Je me souviens très bien de mon adolescence ; dans ma chambre ornée de posters, l'ordinateur portable au chaud contre mes cuisses et les yeux brillants devant l'ecran. Je pouvais passer des heures (des journées entières...) absorbée par des univers virtuels comme que MovieStarPlanet, Stardoll, IMVU, Les Sims... et bien sûr, Ma Bimbo.
Les jeux de mode avaient une emprise hypnotique sur moi. À cette époque, chaque détail comptait : la tenue parfaite, le maquillage idéal, la coiffure qui faisait tourner les têtes. Je ne me contentais pas d'habiller des avatars ; je façonnais mes goûts et je testais des identités... Et même si je ne le savais pas à l'époque, ces petits mondes numériques posaient tranquillement les fondations de ce que je deviendrais : une créatrice de mode, une écrivaine, une femme pour qui l'expression de soi est sacrée. Ils m’ont façonnée, bien plus que je ne l’aurais cru. Ils m’ont appris à rêver, à créer, à oser. À m’habiller non pas pour plaire, mais pour exister.
Mais en cours de route, j'ai arrêté de jouer.
Au fil des années, la vie a commencé à s'alourdir de responsabilités. L'école s'est transformée en plan de carrière. Les passe-temps se sont transformés en échéances. La vie a pris un rythme effréné. Et tous ces jeux si étincelants que j'adorais autrefois se sont lentement éteints, leurs serveurs se sont tus et leurs salons de discussion ont été abandonnés comme des pistes de danse oubliées. Comme tant d'autres, je les ai laissés derrière moi. Nous avons grandi, et ces univers colorés ont lentement perdu de leur éclat.
Et pourtant, récemment, je me suis demandé : pourquoi ?
Était-ce simplement le temps ? Ou quelque chose de plus profond ?
J'ai rouvert Ma Bimbo sur un coup de tête, après avoir regardé le live twitch de Léna Situations. Et tandis que le jeu loaded, et que ma bimbo clignait des yeux avec ses cils brillants, cela m'a frappé : l’âge adulte n’a pas enterré mon âme d’enfant six pieds sous terre ; je l’avais simplement mise de côté. Elle a toujours été présente, quelque part en moi.
L’âge adulte, avec ses responsabilités et ses exigences, peut facilement écraser une part de notre être. Les rêves d’enfant, cette spontanéité et cette créativité qui nous animaient autrefois, se retrouvent souvent mises de côté face aux impératifs du quotidien. La pression sociale, le besoin de réussir, et la peur de l’échec nous poussent à adopter des masques, à ranger nos émotions et à refouler cette innocence qui nous rendait uniques. Petit à petit, ce processus peut étouffer notre authenticité et nous faire oublier qui nous étions vraiment.
Dans un monde qui nous demande d'être efficaces, minimaux et sérieux, revenir à des jeux comme Ma Bimbo est un échappatoire. Aujourd’hui, je vois ce jeu sous un autre jour. Plus qu’un simple jeu, c’est un témoignage de notre évolution, une capsule de notre créativité et de notre insouciance. La mode virtuelle reprend vie, portée par une nouvelle génération, mais aussi par nous, ceux qui ont grandi avec ces pixels et ces robes virtuelles. Ma Bimbo n'est pas seulement un jeu, c'est un endroit où on pourra toujours retrouver ce qu'on a oublié avec le temps.
Me revoilà donc, les talons trop hauts et jupe trop courte, connectée non seulement pour jouer, mais aussi pour me souvenir.
Parce que peut-être que l'enfance ne nous a jamais quittée.
Peut-être avions-nous juste besoin de changer de tenue.
Dernière modification par AndreaShalev (Le 02-06-2025 à 18h55)