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Forum - Ma-bimbo.com, jeu de mode ! Jeu de filles et jeu pour filles

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#826 Le 04-07-2018 à 20h11

Bimb'sensei
HelvegeN
.
Messages: 1 043

Zicielka j'ai sûrement mal compris mais t'es bien en train de dire que tu préfères l'expression "personnes avec utérus" à "femmes" ?

Et tu parles de quel article sur le transféminisme ? Si la notion de non-binarité n'est pas abordée c'est très certainement une position volontairement affichée, une analyse matérialiste de la question. J'vois pas à quel article du fais référence donc j'peux pas être certaine.

Quant aux TERF, elles sont bel et bien féministes. Encore une fois ce n'est pas parce que tu ne les considères pas féministes qu'elles ne le sont pas. Et crois-moi ça me fait pas plaisir de le dire. C'est une position qu'elles tiennent, tout comme il y a des féministes d'extrême-droite.

Par ailleurs, qu'est-ce qui te dérange dans "l'identité de genre et l'orientation sexuelle ne peuvent pas être innées/biologiques" ?

Dernière modification par HelvegeN (Le 04-07-2018 à 20h17)




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#827 Le 04-07-2018 à 21h38

Bimb'Super Saïyen
Hellyana
...the true memory you left me with is a key to the wine of melancholy...
Messages: 7 672

HelvegeN a écrit :

Zicielka j'ai sûrement mal compris mais t'es bien en train de dire que tu préfères l'expression "personnes avec utérus" à "femmes" ?

Moi je pense que tu as très bien compris /vendor/beemoov/forum/../../../public/forum/smilies/wink.png


HelvegeN a écrit :


Et tu parles de quel article sur le transféminisme ?


Je supposes que Zicielka parle de l'article que tu as posté ici (C'est ça Zicielka ?)


Zicielka a écrit :


le postulat de départ "l'identité de genre et l'orientation sexuelle ne peuvent pas être innées/biologiques" m'a fait fuir :')


Si on part du principe que l'identité de genre est (ou peut être) innée, comment définit on le genre ? C'est quoi être un homme, une femme, ou autre(s) ?  /vendor/beemoov/forum/../../../public/forum/smilies/hmm.png


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Sous le doux poudroiement l'arbre à peine remue de peur de laisser choir la fourrure menue dont ses bras arrondis retiennent la pâleur...

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#828 Le 04-07-2018 à 21h41

Bimb'sensei
HelvegeN
.
Messages: 1 043

Hellyana c'est pas la peine d'être passive-agressive parce que je n'ai vraiment pas compris. Donc j'attends de voir avec Zicielka.
Et oui effectivement je viens de me souvenir de l'article que j'avais partagé, ça remonte à quelques pages déjà.

Edit : j'suis pas sûre que tu sois passive-agressive en te relisant /vendor/beemoov/forum/../../../public/forum/smilies/lol.png purée j'aime pas les messages écrits j'arrive pas à percevoir le ton de mon interlocuteur-ice.

Dernière modification par HelvegeN (Le 04-07-2018 à 21h44)




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#829 Le 04-07-2018 à 21h54

Bimb'Super Saïyen
Hellyana
...the true memory you left me with is a key to the wine of melancholy...
Messages: 7 672

HelvegeN a écrit :


Edit : j'suis pas sûre que tu sois passive-agressive en te relisant /vendor/beemoov/forum/../../../public/forum/smilies/lol.png purée j'aime pas les messages écrits j'arrive pas à percevoir le ton de mon interlocuteur-ice.


Non je 'l'étais pas /modules/forum/img/smilies/blebl.gif


Je pense effectivement que Zicielka préfère l'expression "personnes avec utérus" à "femmes", comme tu le disais (donc malgré tes doutes je pense que t'avais bien compris /vendor/beemoov/forum/../../../public/forum/smilies/wink.png).

Elle soulignait le fait que dire que les femmes portent les enfants, les femmes ont leurs règles, etc. sous entend que seul les femmes... or les hommes trans ou personnes non binaires peuvent aussi être concernées. Dire personnes avec utérus est plus inclusif. C'est ce que j'ai compris de son message.
Après à Zicielka de clarifier tout ça.


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#830 Le 04-07-2018 à 21h56

Bimb'sensei
HelvegeN
.
Messages: 1 043

Excuse-moi j'ai mal lu et réagi au quart de tour, j'ai tilté après /vendor/beemoov/forum/../../../public/forum/smilies/lol.png

Et du coup je suis pas d'accord, si parler de "femmes" est réducteur quand il existe des hommes trans qui bien évidemment vivent les mêmes choses que les femmes cis, parler de "personne à utérus" est terriblement sexiste et réducteur. Alors ce sera non pour ma part.




https://i.pinimg.com/150x150/2c/46/25/2c46256213f6d44196c16b562768aeb5.jpghttps://encrypted-tbn0.gstatic.com/images?q=tbn%3AANd9GcQdcsRah1cJLqrIUl_wxHn3kc7sCtQh5TCt6g&usqp=CAU

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#831 Le 04-07-2018 à 23h16

Bimb'crodulevel
Lunavha
...
Messages: 4 425

le postulat de départ "l'identité de genre et l'orientation sexuelle ne peuvent pas être innées/biologiques" m'a fait fuir :')

Alors là j'ai un peu peur parce que ça sonne un peu (beaucoup) essentialiste tout ça.

Quant à "personnes à utérus", j'dis pas ça, dans le délire "je te rabaisse à tes organes génitaux" c'est trop pour moi. Ensuite, je pense que les problèmes soulevés dans notre conversation sur le non désir d'enfants justifie l'utilisation de "corps de la femme" (ndlr : cis) dans la mesure où l'obligation et l'injonction à enfanter et materner, dans nos sociétés, tombent sur les individus de sexe féminin ET de genre féminin. Donc concrètement ça concerne les femmes cis.

Dernière modification par Lunavha (Le 04-07-2018 à 23h18)


C'est l'histoire d'un cheval qui se rend dans une boulangerie à vélo. Il va voir la boulangère et lui dit:
- Bonjour madame la boulangère, auriez-vous des tartes à la fraise?
- Non désolée je n'ai plus que des tartes à la fraise.
- Oh c'est pas grave j'étais venu à vélo.

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#832 Le 04-07-2018 à 23h34

Bimb'incrust
isabelleh
**************************
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Zicielka, sauf que le sujet de la quasi totalité de la conversation c'était la pression qu'on met sur les femmes cis concernant la maternité. L'obligation de maternité qu'on leur impose, un sujet qui concerne donc principalement les femmes cis (et en couple hétéro, vu qu'on n’interdit même aux couples non cis hétéro d'avoir des enfants). On sait qu'il n'y a pas que les femmes cis qui peuvent avoir des enfants, mais personne va mettre la pression à un homme trans ( et probablement sur une personne NB) pour faire des bébés.

Que propose tu donc, qu'on n'aborde plus aucun sujet féministe cis hétéro sur ce topic parce qu'en les abordant on fait du cisexisme et qu'on entretien l’hétéro-normativité?

Je veux bien faire gaffe à la manière dont je m'exprime mais là j'ai juste pas compris ou tu veux en venir et c'est pas en nous engueulant qu'on risque de comprendre quoi que ce soit.

Edit: quiche que je suis avais oublié de cliquer sur poster avant de poster et vient de me rendre compte que que je répète ce qu'a dit Lunavha.

Dernière modification par isabelleh (Le 04-07-2018 à 23h38)


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#833 Le 05-07-2018 à 09h14

Bimb'crodulevel
Lunavha
...
Messages: 4 425

Tu répètes bien et tu expliques mieux, je suis contente que tu aies quand même répondu /vendor/beemoov/forum/../../../public/forum/smilies/lol.png


C'est l'histoire d'un cheval qui se rend dans une boulangerie à vélo. Il va voir la boulangère et lui dit:
- Bonjour madame la boulangère, auriez-vous des tartes à la fraise?
- Non désolée je n'ai plus que des tartes à la fraise.
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#834 Le 05-07-2018 à 11h05

Bimb'Bronze
missmimijuju22
Sun of a beach
Lieu: N'importe où, du temps qu'il y a de la bouffe.
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Et tant qu'on y est, faut aussi faire gaffe à ce qu'on met derrière le mot TERF. Parce que, perso, je me suis fait traiter deux fois de TERF: quand j'ai dit que j'étais globalement contre l'industrie du porno et de la prostitution, et quand j'ai dit que le fait d'avoir de cheveux courts et du vernis à ongles ne faisait pas de moi une non-binaire. Absolument rien de transphobe, donc. Tout ça pour dire que j'ai l'impression que le mot (l'acronyme plutôt d'ailleurs)TERF est utilisé en mode épouvantail, genre "Ouuuuh, regardez les méchantes féministes", et à part pour ce qui est d'inviter les femmes (et tout particulièrement les lesbiennes) à aller se pendre, j'en ai pas encore vu de réelle utilité.

Je suis pas forcément d'accord avec Lunavha et isabelleh sur le fait que l'injonction à la maternité ne concerne que les femmes cis (après, c'était peut-être là-dessus que portait la discussion, j'avoue que ma mémoire me joue des tours et que j'ai eu la flemme de tout relire, M'ENFIN BREF, dans l'absolu, je ne pense pas que ce soit le cas). Je vois pas en quoi on mettrait pas la pression sur les hommes trans et les nb femelles pour que, justement, iels se comportent "comme des femmes" et fassent des gosses (pareil avec les lesbiennes/femmes cis en couple lesbien par ailleurs, on veut pas qu'elles aient des enfants avec leur compagne, par contre ça nous dérangerait pas qu'elles se trouvent un mec et qu'elles fassent des bambins). Mais du coup, ça reste une problématique liée au genre féminin, ce qui justifie tout de même l'emploi du mot "femme". (Je sais pas si je suis claire, mais bon) (En fait, je veux dire qu'on s'en tamponne allègrement que tu t'identifies comme homme, femme, agenre ou autre, tant que t'es né.e avec la capacité d'enfanter, bah faut que t'enfantes) (Et encore pire si t'es né.e femelle avec une anormalité qui t'empêche d'enfanter (stérilité, absence d'utérus, que sais-je), là, on va te foutre la honte parce que t'atteindras jamais le but de la "vraie femme")
Et puis aussi, c'est juste mon ressenti, j'ai l'impression qu'utiliser des termes comme "personne à utérus", "personne à ovaires", "personne enceinte", ça fait éclater la catégorie femelle et occulte le fait que ces problématiques s'adressent aux individus nés femelles (qui reste tout de même, sauf si grosse erreur de ma part, une des définitions du mot femme. Je suis pas contre utiliser "individus de sexe féminin", "individus femelles" whatever, n'empêche qu'on peut pas en  vouloir aux gens d'utiliser le mot qui a toujours collé à ces définitions, pour elleux)

Et enfin, si je vois pas ce qui s'oppose au postulat: "l'orientation sexuelle est biologique", dire que l'identité de genre est biologique, ce serait supposer que le genre lui-même est biologique. Or, on nous a assez rabâché que "gendeur iz euh sochaule constreuct", on peut pas se ramener et dire: "Ah lol nope, c'est biologique en fait, allez bisous".



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#835 Le 05-07-2018 à 11h21

Bimb'Argent
Norellenilia
The streams shall run in gladness, the lakes shall shine and burn
Lieu: Dans le frigo
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Missmimijuju -> Bah justement en fait, l'injonction à la maternité elle est faite sur le groupe identifié comme femme par le système patriarcal. Ce qui fait qu'un homme trans ou une personne NB "femelle" (en tout cas celleux qui ont pas de passing cis ou bien qui n'ont pas encore transitionné officiellement) peuvent effectivement recevoir cette injonction, mais - et ce que je vais dire va probablement être violent, désolée d'avance - iels vont pas la recevoir en tant qu'homme trans ou personne NB, mais en tant que femmes. Pas parce qu'iels sont des femmes, mais parce qu'iels sont identifié-e-s comme femmes (cis) par le patriarcat qui ne leur reconnaît pas le statut d'homme trans/NB.

Quant à "l'orientation sexuelle est biologique" ça n'a pas été prouvé, et ça n'a pas à l'être. Et je crois que ce qui est entendu dans le texte mentionné, c'est que si on vivait dans un monde sans homophobie, il n'y aurait pas d'orientation sexuelle, parce qu'il n'y aurait pas d'homo, d'hétéro, de bi, juste des gens avec des attirances différentes et on en aurait rien à faire. C'est en ça qu'on peut dire que l'orientation sexuelle c'est social (si je dis pas de bêtises et si j'ai bien compris le texte)

Dernière modification par Norellenilia (Le 05-07-2018 à 11h24)


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#836 Le 05-07-2018 à 12h58

Bimb'incrust
isabelleh
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Missmimijuju22, oui oki dans le sens on met sur tout le monde la pression pour se conformer au modèle : une maman + un papa avec des enfants (et je pense qu'on est bien tout.e.s d'accord ici pour s'opposer à ce modèle unique). Et qu'il y a pression sur tout les individus nés femelles pour bien rester femelle et faire des bébés (comme le dit très bien Norellenilia "le patriarcat qui ne leur reconnaît pas le statut d'homme trans/NB"). Je l'entendais dans le sens qu'on ne va pas mettre la pression à un homme trans donc à un homme de faire pousser des bébés dans son ventre. Bien au contraire pour un changement de sexe administratif si je ne me trompe la stérilisation est une des obligations. Par contre si une femme cis nullipare (et même une femme cis avec enfants mais encore en age de fabriquer des bébés) essaye d'avoir recours à une ligature des trompes il y a de forte chance que ça devienne le parcours de combattante (je ne dis pas que c'est impossible mais je pense qu'il faut bien se renseigner ou aller pour le faire). Tout comme on ne va pas mettre de pression directe pour faire des bébés à une femme cis célibataire, on va lui mettre la pression pour qu'elle se mette en couple (avec un homme) pour qu'elle fasse des bébés. Et je serais curieuse de voir la réaction des gens fasse à une femme cis célibataire qui aurait recours à la PMA (légalement c'est possible en Belgique mais je sais que certain centre ne la pratique pas pour les célibataires). Idem pour les couples homosexuels. Je sais pas si c'est un peu plus claire.


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#837 Le 05-07-2018 à 15h32

Bimb'Bronze
missmimijuju22
Sun of a beach
Lieu: N'importe où, du temps qu'il y a de la bouffe.
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Nore: Oui, on est d'accord. C'est ce que je voulais dire au départ, peut-être que j'ai mal compris/ai été mal comprise.
Pour ce qui est de l'orientation sexuelle, je voulais juste souligner que c'est plus compliqué que "c'est pas biologique" (aussi sûrement parce que c'est un argument qu'on utilise souvent pour essayer de faire changer les personnes homosexuelles d'orientation). Mais effectivement, l'orientation sexuelle est sociale parce que le sexe est une catégorie sociale, ok.

isabelleh a écrit :

Et qu'il y a pression sur tout les individus nés femelles pour bien rester femelle et faire des bébés [...]Je l'entendais dans le sens qu'on ne va pas mettre la pression à un homme trans donc à un homme de faire pousser des bébés dans son ventre
C'est pas un peu contradictoire, vu que les hommes trans sont nés femelles?
Ou alors, tu veux dire que brandir la carte "je suis un homme" atténue la pression? Dans ce cas je comprends, pas sûre que ça marche comme ça pour tout le monde partout, mais l'argument a plus d'effet au vu des rôles sociaux attribués aux hommes et aux femmes.



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#838 Le 05-07-2018 à 17h08

Bimb'Argent
Norellenilia
The streams shall run in gladness, the lakes shall shine and burn
Lieu: Dans le frigo
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missmimijuju22 a écrit :

C'est pas un peu contradictoire, vu que les hommes trans sont nés femelles?
Ou alors, tu veux dire que brandir la carte "je suis un homme" atténue la pression? Dans ce cas je comprends, pas sûre que ça marche comme ça pour tout le monde partout, mais l'argument a plus d'effet au vu des rôles sociaux attribués aux hommes et aux femmes.

Je pense que c'est surtout les hommes trans pas out ou qui cispassent pas qui se prennent ça. Une fois que le système les identifie comme hommes, ils vont plus se prendre cette pression, je dirais même que les gens seraient contents qu'ils se """reproduisent""" pas, parce que s'ils sont identifiés comme hommes trans, alors là c'est le scandale.

Dernière modification par Norellenilia (Le 05-07-2018 à 17h08)


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#839 Le 05-07-2018 à 17h32

Bimb'Bronze
missmimijuju22
Sun of a beach
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Yep, c'est la conclusion à laquelle je suis parvenue également.



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#840 Le 05-07-2018 à 18h31

Bimb'adonf
Evelirune
Messages: 488

@Nannyehi

Evelirune, je te remercie de toutes ses infos mais je suis un peu étonnée, comme Zicielka mon choix n'est pas motivé par des raisons politiques (même si j'aimerais que ça bouge certes...) mais par le fait qu'au bout de longues, longues, si longues années à me sentir mal dans mon genre j'ai décidé de secouer ce fardeau en reprenant le pouvoir sur ce que je suis: un être humain, point c'est tout.  Ce n’est pas seulement lié aux stéréotypes de genres mais aussi aux caractéristiques biologiques de genres... Je veux être libre.



Oula j'ai l'impression qu'il y a quiproquo. Je ne dis pas qu'il faut faire le choix de transitionner pour des raisons politiques (grand dieu quelle horreur de penser que la vie des dominé.e.s doit être uniquement tourné vers le politique et sa violence intrinsèque) mais que le choix du type de non-mixité à adopter doit se faire en fonction des combats que l'on choisit de mener.
Parce que bon, la non mixité c'est un outil militant normalement hein ^^


Par exemple, inclure toutes les personnes intersexes qui ont subies de la chirurgie génitale / des traitements hormonaux forcés peut faire sens pour parler de mutilations gynécologiques et des mauvais traitements médicaux au sens large, mais pas pour parler, par exemple, du couple comme espace de pouvoir. Pourtant les deux sujets sont liés aux problématiques féministes.


Enfin, c'est personnellement un souci que j'ai avec une part non négligeable de la théorie queer. A postuler que ce sont aux minorités de genre de "performer" leur existence dans une logique de micro-résistance, bon déjà perso je trouve pas ça politiquement pertinent dans la mesure où pour moi le seul levier est et a toujours été l'action collective et organisée (attention cependant car il existe des mouvements queers la pratiquant, l'exemple le plus connu étant sans doute Act Up) mais surtout parce que ça place les dominé.E.s, seulEs, face à la violence sociale qu'implique la remise en cause des catégories hommes / femmes. Perso considérer que c'est à des personnes déjà marginalisées et précarisées de se mettre encore plus en danger exposant leur """anormalité""" seul.e.s contre tous pour un effet pour le moins incertain me rend très dubitative.


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Ananas002 mamzellewikette95 et Zicielka Pour répondre "rapidement" (la rumeur dit que je suis incapable de répondre en moins de trois pages et en moins d'un mois, et je dois bien dire que... bah c'est pas faux) :


.... ok le rapidement était un pur mensonge. Préparez vous, ça va être long. Du coup j'vais mettre des titres par parties parce que mdr.

https://media.giphy.com/media/SWjCswum5dc0E/giphy.gif



Féminisme intersectionnel?


- Ce que j'essaie de dire c'est que le "féminisme intersectionnel", ça n’a pas vraiment de sens. Outre le fait que l'invention du concept s'inscrive dans un contexte géographique et temporel précis (les USA de la fin de années 80), Crenshaw a surtout cherché à montrer comment la loi rend naturelles les catégories de genre et de race, et surtout comment le croisement de plusieurs facteurs créent une nouvelle position sociale, non réductible à la somme des parties croisées et non reconnue par le droit. Par-là, elle a montré que les luttes avaient tendance à être monothématiques, à ne prendre comme sujet de référence que la femme blanche de classe moyenne sup' dans le cadre du féminisme, l'homme noir dans le cadre de l'antiracisme, et que les formes particulières que prenaient cette altérisation ne pouvaient être combattues de la sorte. Elle montre aussi comment ces deux luttes pouvaient parfois apparaitre comme contradictoires, en prenant l'exemple des violences conjugales: l'effort des féministes de politiser ce sujet pour les femmes de couleur pouvant aller contre les luttes antiracistes, qui cherchent à sortir de l'image d'une communauté faite d'hommes sauvages et violents, tout en travaillant à maintenir une communauté soudée sur une base identitaire. Cette distension étant évidemment épuisante tant d'un point de vue militant que moral pour les femmes noires.




Sauf que, et outre le fait que le terme est de plus en plus utilisé hors de ce contexte (encore une fois perso ça me pose soucis de voir que la plupart des gens qui s'en réclament aujourd'hui soient blancs et que l'intersection race/genre ait tendance à passer au second plan), outre le fait que le terme est utilisé de plus en plus n'importe comment pour montrer à la face de twitter à quel point on est inclusif et sAaFe / W00ke... baah l'intersectionnalité c'est une méthode d'analyse et uniquement une méthode d'analyse. Elle ne dit rien de son objectif politique, et c'est précisément pour cela qu'il est pour moi abusif de parler de "féminisme intersectionnel" en tant que courant, courant qui est défini par le fait ET d'avoir une méthode d'analyse, ET un objectif, ET les grandes lignes d'une méthode d'action. Ce n'est pas le cas de l'intersectionnalité, qui n'a que le premier.


Pour le dire plus vulgairement, c'est un moyen de performer le fait que l'on s'inscrive dans certains cercles militants virtuels sans trop se mouiller sur le caractère intrinsèquement clivant du fait d'avoir choisi un cadre d'analyse (parce que bon, en vrai à part les extrêmes centristes et les gens de droite PERSONNE n'est contre l'intersectionnalité).




Aussi, on voit des gens se réclamer de l'intersectionnalité vouloir que les femmes noires se taillent la part du lion dans les entreprises. On voit des gens parler d'intersectionnalité et dire que faire grève et un privilège (?) petit bourgeois (!!!). On trouve des gens qui s'en réclament être réformistes, d'autres être communalistes ou appellistes. On trouve des gens qui se réclament du féminisme intersectionnel qui visent la reconnaissance et la visibilité de toutes les "identités marginalisées", d'autres qui pensent que le noyau de l'exploitation est le fait qu'une classe tire des bénéfices du travail d'une autre et que c'est là le noyau auquel il convient de s'attaquer.




Autre constat que je fais malheureusement, c'est que se revendiquer intersectionnel, généralement c'est dans l'objectif d'être "inclusif". Or, et outre le fait que je déteste ce mot (sérieux ça renvoie exactement à ce que j'expliquais dans mon post d’avant : le général contre le particulier, général qui ferait la grâce d'inclure les parias, SU-PER), à aucun moment ne se pose la question de l'objectif politique. Parce que bon il me semble que je l'ai déjà dit, mais la non-mixité normalement l'objectif c'est de se réunir entre personnes dont les intérêts matériels sont les mêmes. Qui, pour utiliser du gros vocable marxiste moche, font partie de la même classe, de sexe par exemple.
Alors certes ces classes ont des contours flous et diffèrent selon notre place sous d'autres aspects (macro, comme la race ou la classe sociale, mais aussi à l'échelle d'un quartier, d'un pays ou d'une ville par exemple), et donc dire que telle forme de non-mixité est supérieure à telle autre est un non-sens. C'est justement pour ça qu'il faut se demander les intérêts de quelle classe on entend défendre lors d'actions précises. Des femmes ? Des minorités de genre au sens large ? Des femmes noires ? La non-mixité choisie doit, pour moi se subordonner à ce qu'on a l'intention de faire. De même pour le choix de pratiquer la non-mixité d’ailleurs ; y'a des fois où on a juste besoin de monde pour faire pression et où faut pas hésiter à recruter tout le monde, même si le dit monde peut être casse-pied, pour parler poliment.




De même, puisque la non-mixité est un outil militant, il est totalement abusif selon moi d'utiliser ce vocable pour désigner des groupes affinitaires dont l'objectif n'est pas la mise en place d'un organisme ayant pour objectif le lobbyisme en faveur d'une transformation sociale. Si de tels groupes existent (et ils existent), il est selon moi plus juste de les qualifier de groupes affinitaires construits sur des bases identitaires ou militantes, et non "d'espace non mixtes".



En outre, cette version déformée de l'intersectionnalité a pour effet de créer une figure de "grand méchant loup", de dominant ultime que serait le mec blanc, cis, hétéro, valide, bourgeois (+ dyadique (= le "contraire" d'intersexe), + neurotypique + ...) comme si c'était lui, et lui seul, qui était oppresseur. Du coup j'ai déjà vu des gens réclamer l'inclusion des hommes cis gays dans les espaces non-mixtes féministes parce qu'ils subissent aussi le sexisme (!!!). La question de "qui exploite / qui profite matériellement de l'exploitation des femmes?" n'est plus posée. Pourquoi les LGBTQIphobies existent non plus. Et personnellement je trouve ça dommage et dangereux de ne plus réfléchir en termes de rapports sociaux mais d'étiquettes individuelles, déclinables à l'infini sans se poser la question de leur utilité au-delà d'une volonté de se décrire soi-même et d'obtenir une "légitimité" au sein d'un groupe.



LGBTI, histoire, cohérence du mouvement, ressenti, phoque et asexualité



Parlons-en des étiquettes d'ailleurs, et pour ça petit historique. Bien qu'inventés à la fin du XIXe siècle par le militant homosexuel Karl Maria Kertbeny, les termes homosexualité et l'hétérosexualité tels qu'on les conçoit aujourd'hui sont des concepts très récents. En réalité, et jusqu'à l'époque Victorienne, les idéaux masculins et féminins étaient définis par leur distance vis-à-vis du désir, considéré comme anormal si n'ayant pas pour but la procréation. Jusqu'au début du XXe siècle, l'hétérosexualité est définie dans les dictionnaires médicaux non comme l'attirance pour les gens de l'autre sexe, mais comme "un appétit morbide pour le sexe opposé". Ce n'est que dans la première moitié du XXe siècle que cette dernière va se trouver être valorisée, afin de favoriser la stabilité et l'intimité matrimoniale en plus de lutter contre la dénatalité. Ce changement est permis par les transformations de la famille, qui passe de lieu de production (d'enfants et d'argent) et de transmission de patrimoine à lieu de consommation et d'usage libre du corps.



Aussi, les apologies de la pureté furent de plus en plus accusés d'encourager l'homosexualité en alimentant la méfiance envers l'autre sexe: la mise en avant de l'hétérosexualité est l'occasion de réaffirmer les frontières entre hommes et femmes. Ladite réaffirmation, quasi obsessionnelle aux USA, ayant pour cause les inquiétudes des hommes quant à leurs pouvoirs sur les femmes, et l'évolution du rôle de ces dernières dans la division du travail productif et domestique. De même, le nouvel idéal de la femme hétéro, douée de désir et épanouie dans son couple s'est construit en réponse à une peur de risque de sécession due à l'accession par de nombreuses femmes à l'indépendance économique. Cette libération restait cependant limitée au cadre du mariage, et il faudra attendre les années 60 et la ""libération sexuelle"" pour que la sexualité hétéro se retrouve valorisée pour elle-même; élargissant de fait les frontières de la normalité sexuelle mais renvoyant aussi pour plusieurs décennies l'homosexualité dans un espace déviant et pathologique aux contours plus étroits. La figure du pervers devient celle de l'homosexuel masculin, et l'orientation sexuelle n'est désormais plus fondée sur la norme sociale mais sur le désir. Si les anciens interdits reconnaissaient, en creux, qu'ils prohibaient quelque chose d'universellement désirable et que la morale consistait à ne pas y succomber, les hétéros se vivent hétéros par inclinaison naturelle et non par contrainte sociale, ce qui a pour effet de transformer l'homosexualité en nature alternative à l'hétérosexualité, et non comme un spectre intérieur menaçant chaque hétérosexuel.


Paradoxalement, ce changement les rapproche aussi en les dotant de propriétés communes: les deux sont désormais des dispositions individuelles qui concernent le désir indépendamment d'une éventuelle activité sexuelle, et sont théoriquement sans lien avec les performances de genre et sans lien avec d'autres attributs culturels. Les deux sont également le fruit d'une nouvelle conception des relations sexuelles, de l'amour et du couple.



Plus tard, le biologiste Alfred Kinsey formulera sa version de ces nouveaux critères de classement de la sexualité. Tout en les présentant comme une réalité anhistorique (= qui existe en dehors de tout contexte culturel et temporel), sa méthode fait apparaitre homosexualité et hétérosexualité non comme des catégories étanches mais comme deux pôles d'un éventail varié de relations et de pratiques, qui peuvent varier au cours de la vie. L'idée de gradation constitue un évènement culturel et politique marquant: elle contribue à dé-pathologiser l'homosexualité et à faire progresser une conception symétrique des orientations sexuelles. De plus, la focalisation sur l'objet du désir laisse intacte la définition sexuée sur sujet : les gays sont bien des hommes, et les lesbiennes sont bien des femmes. Malheureusement, bien qu'elle semble rendre plus poreuses les frontières entre hétéro et homosexualité, l'échelle graduée qui les sépare les constituent dans le même dans comme des pôles opposés d'un axe prenant pour objet de mesure le choix d'objet. Dans cet espace d'identification, plus on est hétérosexuel moins on est homo et vice versa.




Pourquoi je vous raconte ça ? Parce que bon en vrai à part pour briller en société on pourrait s'en foutre. Parce que ce qui fait la cohérence politique du signe LGBT, c'est le fait de remettre en cause le genre, la hiérarchie sociale. C'est le cas de l'homosexualité, et c'est encore plus visible avec la transidentité. Ce n'est pas une histoire d'avec qui on couche, de qui on tombe amoureux et de comment on se ressent. Être LGBT, ce n'est pas faire partie de la grande famille des identités et des pratiques / attirances sexuelles qui sortent de "l'hétéronorme de relation" pour citer des théories en vue sur Twitter, c'est subir la réprobation sociale parce qu'on ne respecte pas les rôles genrés et leur hiérarchie intrinsèque. Or le genre, faut-il le rappeler, ce n'est jamais que le système de catégorisation hiérarchique séparant (chez nous) l'humanité en deux groupes, deux classes de sexes, étanches et hiérarchisées, que sont les hommes et les femmes. Ces deux classes de sexe sont définies par les rapports d'exploitation qui les lie (les hommes tirent profit du travail gratuit des femmes): être une femme c'est faire partie de la classe de sexe exploitée par le patriarcat, être un homme faire partie de la classe exploiteuse, le lieu privilégié de cette exploitation se trouvant être le couple hétérosexuel, et toutes les différences entre les hommes et les femmes, perçues comme naturelles, ne sont en réalité que des constructions sociales s'auto-reproduisant dont le but est de maintenir en place cette hiérarchie sociale.



De fait, les personnes relationnant avec des gens de la même classe de sexe ne font pas ce qui est socialement attendu d'elles (exploiter / être exploité au sein du couple), et qui par leur existence remettent la naturalité du genre en question. Que ça soit dans les rapports qu'entretiennent les classes de sexe, ou dans l'étanchéité et l'immuabilité des catégories elles-mêmes (en (souhaitant) changer de classe de sexe, dit autrement en transitionnant). Là est pour moi le nœud de l'homophobie et de la transphobie, là est la cause de l'oppression des LGBTI.



... Et on va pouvoir en venir au sujet qui fâche: c'est précisément pour ça que, pour moi, les personnes asexuelles ne le sont pas.



Lien de l'image externe




Mais avant ça disclaimer. Je sais que le discours que je vais tenir ici va être perçu par certain.e.s comme violent. Peut-être même certain.e.s ont-ils déjà cessé de lire à la phrase précédente en se disant "Bordel Eve elle est acephobe / elle invalide mon existence, choqué.e déçu.e.". Sauf que non (et en plus elle nie §§§), et pour plusieurs raisons.




Déjà, je ne dis pas que le ressenti de qui que ce soit n'existe pas, ou que le rapport de qui que ce soit à son corps, au corps des autres ou à la sexualité n'existe pas, ce serait un non-sens tant logique (je ne suis pas Akinator je ne devine pas ce qui se passe dans la tête des gens) que militant (expliquer aux gens la manière dont ils vivent leur rapport au corps social ou leurs relations inter-individuelles c'est un peu le summum non seulement du manque de respect mais aussi de la condescendance). De même, je ne remets aucunement en question le vécu, les violences, ou quoi que ce soit d'autre. Je les analyse différemment, c'est très différent.



Asexualité et ronchonceries


Déjà premier problème, l'asexualité est définie non comme un rejet pur et simple des relations charnelles dans le couple, mais comme le fait de ne pas ressentir d'attirance sexuelle envers les gens, ou de n'en ressentir qu'à certaines conditions, ce qui est très différent: de fait ça ne dit rien des pratiques effectives, ni de si on est consentent auxdites pratiques. Pire encore, dès lors que l'asexualité est pensée comme un spectre, les contours en deviennent flous (ce qui n'est pas un problème en soi, après tout c'est le cas de toutes les catégories de dominés) mais surtout est tellement englobante qu'au bout du compte on se retrouve à toustes être un peu asexuel.le.



Enfin, et c'est probablement ce qui me pose le plus de soucis, c'est qu'à essentialiser (= à ne plus la penser construite socialement, construction elle-même située dans le temps et l'espace) l'attirance sexuelle et le désir, l'asexualité ne permet plus de questionner le rapport compliqué que l'on peut avoir avec les relations intimes, notamment en raison d'une transidentité ou du fait d'être une femme. Les violences que tu as vécues font que ton rapport à la sexualité est conflictuel et varie de l'amour à la haine (ou se résume à la haine d'ailleurs)? Paf, tu es Caedsexuel ! Tu es une femme qui a intégré que pour coucher il fallait avoir des sentiments? Paf, tu es demisexuel ! T̶u̶ ̶e̶s̶ ̶u̶n̶ ̶v̶i̶o̶l̶e̶u̶r̶ ̶e̶n̶ ̶p̶u̶i̶s̶s̶a̶n̶c̶e̶?̶ ̶P̶a̶f̶,̶ ̶t̶u̶ ̶e̶s̶ ̶A̶p̶o̶s̶e̶x̶u̶e̶l̶ ̶(̶e̶t̶/̶o̶u̶ ̶P̶l̶a̶c̶i̶o̶s̶e̶x̶u̶e̶l̶)̶! Et si malheureusement vous pensez que je troll, je vous invite à rechercher lesdits termes sur Google, par exemple sur le forum AVEN.




Mais ce n'est pour moi pas le cœur du problème, celui-ci se trouve ailleurs. Certain.e.s ici ont peut-être vu passer des phrases outrancières à base de "aujourd'hui pour certain.e.s un mec hétéro polyamoureux aromantique est LGBT. De mon temps, on appelait ça un fuckboy" ou "n'oublions pas de représenter le Pape et les curés, qui sont asexuels et aromantique", qui bien que dans l'exagération pointent un fait pourtant essentiel: être asexuel, et encore plus aromantique, ce n'est pas remettre les rôles genrés en cause en soi. Pour ça je vais devoir expliciter dans un cas où l'asexualité serait le seul marqueur:




   
    - Supposons une femme hétéro et asexuelle, en couple. Effectivement, elle va subir une pression au "devoir conjugal" de la part de son conjoint. Effectivement, sa sexualité va être rendue pathologique. Mais est-ce dû au fait qu'il s'agisse d'une femme ou au fait que cette personne soit asexuelle? Les femmes "sexuelles" ne subissent-elles pas le même sort? Bien sûr que si. Le viol conjugal, il est pour toutes les femmes qui se "refusent" à leur conjoint. Que ce soit par asexualité, à cause du traumatisme d'un accouchement, d'une épisiotomie ou d'un traumatisme tout court, par fatigue due au boulot, ou parce qu'il y a la coupe du monde à la télé. De la même manière, la pathologisation de la sexualité féminine est probablement aussi vieille que le patriarcat lui-même (salut l'hystérie et les histoires d'utérus baladeur). Pareil pour le regard désapprobateur en raison de la sexualité, c'est loin d'être une spécificité (salut le spectre de la salope si tu as le malheur de coucher un peu trop, installe-toi prends une chaise), exactement pareil pour les violences correctives par exemple (ais-je vraiment besoin d'expliciter le "elle méritait son viol cette fille de petite vertu" qu'on a déjà toutes entendu je pense)



- Pour un homme hétérosexuel dans la même situation... bah si violences sexuelles il y a (et l'extrême rareté de la chose et le fait qu'elles ne fasse pas système est purement et simplement absent des discours asexuels, au contraire même), c'est bien plus à cause des mythes virilistes à base d’un homme ça a toujours envie. Mais leur cas est encore plus particulier. Si les femmes asexuelles refusent de fournir le travail sexuel attendu socialement d'elles, les hommes sont dans la situation inverse: ils refusent de le prendre. Cela n'est cependant aucunement incompatible avec d'autres formes d'exploitations (domestique, affective, charge mentale, whatever)... Ou, pour le dire plus grossièrement, ce qui va leur être reproché, c'est de ne pas dominer assez les femmes, de ne pas être assez viril et donc... d'être un pédé, puisque la figure de l'homosexuel est la figure repoussoir chez les hommes, tandis qu'il s'agit de la salope chez les femmes. Cependant ce "manque" de domination peut parfaitement être invisible (sauf si vos collègues mettent des caméras dans votre chambre à coucher, ce qui est un excellent motif pour les poursuivre en justice) et peut même être compensé par une surperformance de la masculinité ou par des mythes sexistes ("je n’ai pas envie de m'engager, les femmes sont des emmerdeuses") par exemple.


Le ressenti est-il un bon outil? (je fais des rimes tavu). Essentialisme, déplacement du regard et anti-féminisme



Bref, ce qui m'emmerde dans les discours sur l'asexualité, ce n’est pas que les gens se définissent comme ils le souhaitent, ça m'est en soi complètement égal. C'est que ces discours aient des prétentions politiques (puisqu'iels parlent d'une oppression spécifique des asexuels, "l'acephobie", et des aromantiques, "l'amatonormativité"), qu'iels ont de fait un objectif de transformation sociale (faire disparaitre lesdites "oppressions")... Sauf que leur analyse n'est pas solide. Je pourrais aller dans des histoires un peu sales à base de comment David Jay, homophobe notoire, a fait rentrer la lettre A dans l'acronyme LGBTI, mais je ne pense pas que ça serait pertinent, après tout d'horribles personnes peuvent faire des choses très bien.
Le vrai problème, il est évoqué au-dessus. En inventant ses oppressions (car rappelons le l'oppression c'est quelque chose de précis, pas un terme parapluie pour dire qu'on est pas assez visible dans la sphère publique), cela ne permet plus de penser dans quels contexte la sexualité est valorisée, dans quels contexte au contraire elle est sujette à opprobre sociale, et surtout chez qui et pourquoi. Les échanges charnels sont mis sur un pied égalitaire, ce qui est un non-sens absolu.





Un autre souci est de se baser sur comment l'individu se ressent, et non sur des faits matériels, c'est que nous ne sommes jamais oppressés uniquement sur la base d'un ressenti, mais à cause d'une position sociale. Je comprends tout à fait d'où vient à la base ce besoin d'intégrer le "ressenti" à l'analyse sur le genre (aka: pour essayer de "comprendre" la transidentité) mais c'est pour moi une impasse. Pour parler vulgairement, les causes de la transidentité, comme les causes de l'homosexualité d'ailleurs, on s'en fout. Quand bien même on arriverait à mettre la main dessus, dans tous les cas il y aura possibilité de pathologisation (c'est inné? C'est une maladie génétique ou un dérèglement des systèmes hormonaux ! C'est acquis? C'est dû à un traumatisme lors de la socialisation !), parce que justement le fait de chercher une cause est le premier pas vers cette pathologisation: on recherche ce qui a bien pu causer cette "anormalité" plutôt que de se demander pourquoi la société considère que s'en est une: ce déplacement du regard ne peut à terme qu'entrainer que deux choses: la tolérance du pourquoi ces groupes sont différents et leur acceptation dans cette différence et non la disparition même des groupes comme entités sociales pertinentes, ou la recherche / mise en place de """thérapies""" de conversion.




On peut également noter le fait que ces définitions basées sur le ressenti sont par définition essentialisantes. Elles ont beau prétendre remettre en cause les normes sociales (le genre, ou l'hétéronormativité) elles ne font finalement que reprendre leur logique d'assignation. C'est particulièrement visible dans les discours sur la non-binarité. Affirmer que lorsqu'on est "binaire" on se sent en adéquation avec son sexe, qu'on se sent "entièrement homme ou femme", c'est juste nier la violence et la contrainte qui vont de pair avec l'assignation sociale à un groupe de sexe où la manière d'être, de penser et d'agir ainsi que les interdits et les tabous sont des normes qui sont imposées par l'extérieur avec lesquelles on négocie toute notre vie durant et que l'on subit, particulièrement lorsqu'on est une femme.


On a ici le plus parfait exemple du danger qu'il y a à raisonner en termes de ressenti. Si les femmes, cis ou trans, se sentent "en adéquation avec leur sexe", alors soit les femmes sont stupides, car elles se sentent en adéquation avec le fait d'avoir des rôles sociaux entièrement façonnés pour justifier leur infériorité sociale et par le fait d'être considérées comme des humains de seconde catégorie, soit la catégorie "femme" existe en dehors de la relation d'exploitation qui la lie à la catégorie "homme" et fait sens en soi hors des contextes économiques et sociaux, et on a un discours essentialiste. Malheureusement force est de constater que ces discours sont attrayants, car très faciles à intégrer. Force est aussi de constater qu'ils donnent naissance à de belles saloperies



Saloperies car en plus de la pathologisation susmentionnée, on aura vite fait de faire du gate-keeping pour les personnes trans à base de oui votre cerveau / vos hormones ne sont pas comme il faut vous n’êtes pas vraiment trans. Or ça me semble "légèrement" aller contre le "changement d'état civil libre et gratuit pour toustes". Ou alors on re-pathologise. Bref, dans les deux cas ça pue.




Autre exemple, et désolée Zic, mais affirmer qu'on nait "homme ou femme" , "homo ou hétéro" ça rentre exactement là-dedans. Le mouvement féministe et LGBTI ont pris un siècle à théoriser que "on ne nait pas femme, on le devient", y compris voire même surtout le mouvement Queer (qui rappelons-le, est né du féminisme matérialiste, notamment via des figures comme Monique Wittig). Ce que tu affirmes là, c'est juste faire un doigt monumental à un siècle de recherche sur le genre et de militantisme féministe et LGBTQI. Alors je sais que c'est très Wooke actuellement de dire personne à utérus, mais perso je vois difficilement plus sexiste que de ramener les femmes à leur vagin et transphobe que de se focaliser à ce point sur ce qu'iels ont entre les pattes.




Surtout que bon, dire qu'il faut inclure les hommes trans dans l'injonction à faire des gosses pour moi c'est totalement à côté de la plaque. On a déjà oublié ce que Thomas Beatie s'est bouffé pour être le premier homme enceint? On a déjà oublié qu'il était vu comme un monstre (tout comme tous les LGBTI d'ailleurs) et que de fait je suis moyennement sûre que la société soit chaude à l'idée qu'iels se reproduisent? Que c'était probablement pour ça que pendant très longtemps la stérilisation des personnes trans était obligatoire pour le changement d'état civil et que celui-ci était possible uniquement si iels n'avaient pas d'enfants?
Désolée, mais là encore c'est un exemple typique de quand la volonté d'être "inclusif" rentre frontalement en contradiction avec le fait de faire de l'analyse sociale. Or le but du militantisme LGBTI, rappelons-le, c'est JUSTEMENT l'analyse sociale, puis la transformation sociale en se basant sur ladite analyse.




Btw, vu que je m'entends bien avec une des autrices du texte conseillé par HelvegeN je lui ai envoyé ton message, et elle te demande de lire le texte avant d'en parler, et ce d'autant plus qu'elles n'excluent pas les non-binaires, parce que leur faire dire des choses fausses ce n’est pas très très Charlie.



(Petite parenthèse enfin, il se trouve que j'ai eu l'occasion de discuter avec un.e haut.e responsable de l'AVA, et que j'ai donc pu lui demander d'où venait ses concepts et définitions. C'est triste à dire, mais la plupart viennent de Tumblr ou de vidéo YouTube, et les "études" demandées par l'institut auraient de quoi faire rougir de honte n'importe quel étudiant.e de L1 de sociologie tant la méthodologie est honteusement mauvaise. Par exemple ici (le lien est en bas de la page) : http://www.asexualite.org/asexualite/)
Bref ce n'est pas parce qu'un organisme a l'air officiel qu'il faut prendre ses propos sans recul critique. De même s’il l'est d'ailleurs (salut le questionnaire sur la biphobie de SOS homophobie)




Convergence des luttes et militantisme



Pour ce qui est de la convergence des luttes, on va dire que je suis pessimiste mais je n'y crois pas. Je sais très bien que les luttes vues comme particulières se feront bouffer par la lutte des classes. En revanche je pense qu'il est possible qu'à force de pressions, il soit impossible de passer à côté des enjeux antiracistes ou féministes : il suffit de voir comme l'écriture non-sexiste devient de plus en plus présentes dans les tracts ou sur les affiches par exemple. En clair faut tellement noyauter les organes de contestation politique qu'il deviendrait impossible de passer outre nos revendications, et que le faire expose à un gros retour de flammes obligeant à se confondre en excuses.




Pour moi, la convergence des luttes est un mantra, une invocation formulée par les milieux militants plus que d'une réflexion véritable. Une déité vaguement définie dont l'invocation consiste à accorder une demi-heure de l'assemblée générale pour voter le droit de coller un paragraphe à la fin du compte-rendu parlant pêlemêle des luttes féministes, anticoloniales, de la situation en Palestine et sur la grève des postiers du coin sans aborder ses sujets avec la profondeur qu'ils méritent et sans y accorder le temps qui devraient l'être. La plupart du temps, l'appel à la convergence des luttes n'est qu'un moyen de s'offrir une occasion de performer à quel point notre groupe de militant.e.s est au fait de tous les sujets plutôt que de se demander comment être véritablement efficace.


En outre, la "convergence" ne s'invoque pas mais se travaille. Ce n'est pas en hurlant "grève générale" en tête de cortège qu'on la réalise mais en travaillant activement aux cotés des grévistes pour les aider à tenir les piquets et en remplissant les caisses de grève. Bref en mettant la main à la pâte sans prendre la main sur le mouvement.




Car c'est également quelque chose que l'on observe trop souvent: que les appels à la "convergence des luttes" soient en réalité une forme déguisée de "toustes derrière mon orga". J'ai encore souvenir des pavés écrits par des appellistes (un mouvement de la mouvance autonome bien qu'y étant minoritaire, qui considère que chaque manifestation doit être une occasion de s'en prendre aux institutions, aux flics et au pouvoir, généralement ils se réclament de gens comme le Comité Invisible et la revue Tiqqun) qui se plaignaient que le mouvement de la famille Traoré (pour les gens qui sont pas en France c'est une asso qui demande à faire la lumière sur la mort d'une personne morte entre les mains de la police, très probablement en raison de violences lors de son interpellation et de négligences graves, alors que l'état semble tout faire pour étouffer l'affaire, et qui plus globalement parle des violences policières en banlieue sur les personnes non blanches) ait pris la tête d'une manif parisienne, car ils ne respectaient pas les "règles" du black bloc, notamment en rejetant les dégradations et l'affrontement avec la police. Que les gens s'étant réunis derrière cette banderole auraient fait face à une violence exacerbée du fait de leur origine sociale et de leur couleur de peau n'est pas rentré dans la balance. Le fait qu'il y ait également dans le lot des personnes en situation irrégulière ou avec uniquement des titres de séjour non plus. Ils ne respectaient pas "leurs" règles, alors ils devaient aller derrière, ce qui aurait fait de cette manifestation la même que toutes les autres, avec toujours les mêmes qui attirent les projecteurs. Converger, c'est aussi mettre de l'eau dans son vin pour mettre sous lesdits projecteurs des gens que l'on ne voit pas et n'entend pas, ou pas assez, d'habitude. C'est aussi mettre son égo au placard. C'est aussi parfois perdre en radicoolité pour attirer des publics qui, normalement, ne viendraient pas.




Je suis totalement d'accord, mais je tiens quand même à préciser que même si oui, le gouvernement s'en fout des débats sur internet, le faire bouger n'est visiblement pas suffisant pour en arriver à une société égalitaire (terme assez flou selon moi d'ailleurs), comme on le voit quotidiennement avec par exemple les ravages de la culture du vi*l. Donc personnellement je trouve que même si militer en milieu privé n'aura pas de conséquences judiciaires, ça n'est pas moins du militantisme car ça permettra de faire bouger la société. D'autant plus que faire bouger le gouvernement n'est pas donné à tout le monde, c'est surtout donné à celleux ayant les ressources pour, ayant une voix qui va se faire entendre : et pour avoir une voix qui va se faire entendre, il faut une notoriété, chose que par exemple, comme tu l'as citée, CrêpeGeorgette a réussi à avoir grâce à son travail de "débats en milieu clos".




Ha mais quand je dis qu'il faut faire bouger les grosses structures ça ne passe pas que pour l'appareil législatif pur hein, ça serait complètement idiot de dire ça. Ça passe aussi par les budgets pour les associations de terrain, ça passe par des politiques publiques en faveur par exemple de la création d'EPHAD ou de places de crèches pour que les femmes puissent travailler et non mettre leur carrière entre parenthèse pour s'occuper des autres, ça passe par des programmes d'éducation sexuelle dans les collèges / lycées etc. Mais bon tout ça coute de la thune, donc faut au moins que ça soit voté dans le budget annuel. On a par exemple la dernière structure pour femmes battues du Loiret qui a dû fermer en juillet 2017 faute de fonds et une maison des femmes menacée de fermeture pour les même raisons y'a même pas un mois (elle a heureusement été sauvée temporairement par financement participatif), ça montre bien que les sous sont quand même le nerf de la guerre.





En revanche, je pense qu'il est naïf de croire que l'on change la société par de l'éducation. En pure déterministe, je pense que les structures font les humains, et non l'inverse. Aussi, si je crois profondément en l'utilité de la vulgarisation pour créer une conscience de classe chez les femmes, je crois également qu'il est naïf de penser qu'on peut mettre fin à la violence des hommes par la même voie, pour la simple et bonne raison que leurs intérêts divergent diamétralement des nôtres et que ce n'est pas en disant "arrêtez d'exploiter svp" qu'ils arrêteront de le faire.


En effet, ces derniers ne nous exploitent pas parce qu'ils sont "mal élevés", mais parce que c'est dans leur intérêt de le faire, et parce qu'ils en ont le pouvoir.


De la même manière, je ne pense pas qu'ils le fassent de manière totalement inconsciente (et des travaux comme ceux de Jaquemart, Thiers Vidal ou Dupuis-Deri m'appuient dans cette idée), mais plutôt qu'ils dressent des barrières pour ne pas voir les conséquences de leurs actions et/ou pour la justifier à posteriori ("elle est plus douée pour ces choses-là" / "oui mais j'ai vidé les poubelles la semaine dernière" / oui mais c'est parce que c'est le rôle des femmes" ...).




Bref pour moi on n’obtiendra rien en attendant leur bon vouloir, il faut donner aux femmes les moyens d'être libres (instruction, indépendance financière, possibilité de divorcer, de travailler...) en créant des structures pour que l’État puisse prendre en charge le travail qu'on leur assigne (crèches etc.), pour que le monde du travail soit moins pensé pour les hommes (baisse générale du temps de travail, réaménagement des entreprises etc.), et pour s'organiser collectivement.


En parallèle il faut bien sûr de l'éducation, mais aussi voire surtout utiliser l'appareil incitatif (voire répressif) pour forcer la main des hommes à faire leur part du boulot.



Militantisme affinitaire et recherche de la sécurité



Après quand je dis "discuter en milieu privé" je ne pensais pas à Crêpe Georgette ou au Seum (lisez les sérieux *force*), qui font un travail formidable et tourné vers l'extérieur, justement dans cet objectif de massification et de formation. Je parle de cette tendance qu'à une part du militantisme féministe, lgbt et antiraciste à se refermer sur lui-même dans des "safe space", entre gens qui sont déjà sinon formés, au moins sensibilisés à certaines problématiques.



Or pour moi la recherche du Safe est littéralement en train de détruire la lutte politique de l'intérieur. Pour expliquer pourquoi, je vais me contenter de citer deux textes que sont "Se défendre : Philosophie de la violence" d'Elsa Dorlin et "Militer : une activité safe ? Pour une critique politique de la notion d’espace safe" de Fania Noël.


Ils sont disponibles aux liens suivants :

- http://www.editions-zones.fr/spip.php?page=lyberplayer&id_article=180002

- http://contre-attaques.org/magazine/article/militer-une

Autant je peux demander sans trop de soucis de lire le second texte dans son intégralité, autant cela m'apparait comme plus compliqué pour le premier puisqu'il s'agit d'un ouvrage entier. Je vais donc me contenter de mettre ici les passages qui m'intéressent pour expliquer ce que je veux dire :

https://nsa39.casimages.com/img/2018/05/09/18050902462060266.png

[...]

https://nsa39.casimages.com/img/2018/05/09/180509024620167075.png

https://nsa39.casimages.com/img/2018/05/09/180509024620428419.png



Bref, mon but n'est pas, clairement pas, de critiquer le cyber-militantisme. Je n’aurais pas fait un quart du chemin qui m'amène à penser ce que je pense aujourd'hui sans lui. Je n'aurais jamais autant lu sans lui. Simplement, il n'a pas le même objectif que le militantisme "de terrain" et j'en constate certaines dérives, qui me semblent dangereuses, parce qu'elles remettent en question notre volonté de transformation sociale pour se concentrer sur le bien être individuel et le pointage du doigt d'individus "problématiques". Nous vivons dans une société où nous sommes rendues faibles et impuissantes, jusque dans nos corps. Plutôt que de nous murer, prenons goût à notre propre force. Faisons trembler cette société qui nous méprise et nous tue.



Enfin, pour l'objectif, perso je ne vise pas une société égalitaire, terme qui sous-tend que l'on conserve deux catégories que l'on mettrait plus ou moins au même niveau, chose qui effectivement ne veut pas dire grand-chose. Ce que je vise, personnellement, c'est l'abolition du genre. L'abolition de la division entre hommes et femmes elle-même. Dit autrement : que la forme des organes génitaux ne serve plus de marqueur pour créer des catégories sociales, mais soit un paramètre parmi les dizaines et les dizaines qui font un être humain, et auquel l'importance sociale pourrait se résumer par la phrase "ok, vu".



Car pour moi, la hiérarchie précède la division. Lorsqu'une société crée des classes, c'est pour justifier la hiérarchie qui les lie à postériori. Par exemple, on a justifié l'infériorité des femmes par leur tempérament, par leur moindre force physique, par un cerveau plus petit, par leurs rôles sociaux qui ont été rendus naturels. Mais la hiérarchie était déjà là, la création et/ou la recherche frénétique de la différence ne sert qu'à la justifier.



Parole aux concerné.e.s !



Pour conclure cette partie beaucoup trop longue (et aussi beaucoup trop en retard (lancez moi des cailloux)), j'aimerai dire deux mots sur le "la parole des concernés" et sur l'essentialisation qui va souvent de pair avec cette affirmation.


A l'origine, on demandait que les oppressés prennent la parole prioritairement sur ce qu'ils subissaient pour deux raisons:
   
    1) La première est que qui dit oppression dit invisibilisation. Alors attention, ne pas être représenté ne fait pas seul d'un groupe un groupe opprimé, l'invisibilisation n'en est qu'une manifestation.

    Et surtout

    2) En étant altérisé, les oppressés sont niés en tant que sujets politiques. Les moyens usés pour se faire varient selon les oppressions (la supposée bêtise du prolétariat due à un manque de culture bourgeoise, la supposée plus grande émotivité des femmes qui les rends incapable de décisions rationnelles, la sauvagerie des racisé.e.s etc.)
   


   
Le "la parole aux concernés", pendante du "ne me libère pas je m'en charge" avait donc à la base deux objectifs:
       


        1) Faire contrepoids à ladite invisibilisation, via de l'action positive (et non de la discrimination positive qui est un terme imposé par les opposants au truc). La logique était peu ou prou la même que pour la parité: sans action contraignante sur les structures même de la prise de parole, on se retrouverait toujours avec les mêmes personnes qui parlent, et avec toujours les mêmes groupes qui se taisent. L'objectif était donc de court-circuiter ce mouvement de fond, en forçant la visibilité de ceux et celles qui ne l'avaient pas



        2) Considérer les opprimés comme des sujets politiques, et donc les considérer capable d'analyse. Les penser capable de défendre seuls leurs intérêts, et donc de cesser de les regarder et de les considérer avec condescendance.
       
       
Cette formule permettait également de prendre en compte un apport qui personnellement me semble important: le point de vue situé de la parole. Du fait de son positionnement social, on aura tendance à plus s'intéresser aux sujets qui nous concernent (le sexisme pour les femmes, la transphobie pour les trans etc.) et surtout on pourra les voir sous un angle "nouveau", puisque l'expérience intime que l'on a de la discrimination nous permet d'en cerner des aspects qui ne sont que difficilement visible pour qui ne les vit pas. Typiquement la charge mentale aurait été bien plus difficile à appréhender sans chercheuses.


       
... Le problème, c'est qu'on est passé de ça à une essentialisation de la parole. Qui ici n'a jamais entendu quelque chose du style "osef de ton avis t'es pas concerné.e" ? Quand on n’est pas d'accord avec l'interlocuteur hein, car en réalité on s’accommode fort bien de la parole des dominants lorsqu'elle va dans notre sens, soyons honnêtes deux minutes. Ça a des vertus bien sûr, notamment de forcer un peu certains à tourner la langue dans leur bouche avant de parler, mais ça a surtout de gros inconvénients:



- On est passé très rapidement d'un stade où on avait des militantEs et sociologues qui faisaient de la vulgarisation à un stade où on estime que, dès l'instant où tu es dominée (ou plutôt "concerné.e" selon la terminologie en vigueur) tu as une connaissance innée des mécanismes sociaux qui régissent ta condition. Et, de fait, toute critique devient impossible. Dire que l'on doit être cru car on sait parce que l'on est, et non parce que l'on a un raisonnement logique, convainquant et basé sur des sources solides, c'est pour moi faire preuve de condescendance. C'est justement se nier comme sujet politique. Car justement le cœur de cette dernière, c'est d'être capable d'être mis face à la contradiction, à SES contradictions même, et de soit les franchir, soit les résoudre. Or la résolution de la contradiction passe nécessairement avec le fait de s'y frotter et de prendre le temps, et non de l'écarter d'un revers de main parce que désagréable.




En outre, on a vite fait de passer à quelque chose d'extrêmement malsain : la tokenisation. De soi-même ou des "concerné.e.s" qui pensent comme nous. Quelque chose contre lequel on a toujours mis une énergie incroyable à lutter: le fameux "oui mais ma tante dit que ce n’est pas sexiste alors ça va". S’il faut écouter les concernés, alors il faut écouter ladite tante, et là ça coince. Je pense qu'on gagnerait bien plus à évaluer les discours pour ce qu'ils sont, mais en prenant en compte qu'ils sont socialement situés, plutôt que de rejeter en bloc quelque chose qui ne nous plait pas si l'interlocuteur n'a pas la bonne étiquette. Et surtout, contre-argumenter, rigoureusement. Ça ne veut pas dire qu'il faut expliquer la vie pour la 20e fois à Jean-Michel Mascu, mais ça veut dire être théoriquement capable de le faire.



Autre souci, et non des moindre: la parole des concernés force l'outing. Si tu traines un peu dans ces milieux, que t'as envie de parler de ce qui te concerne t'as deux choix: soit t'outer, avec tous les dangers potentiels que cela comporte, soit être réduit.e au silence dans ton propre milieu au nom de la parole aux concerné.e.s, ce qui est assez ironique.


Les énonciations de privilèges dans le féminisme en ligne


Autre problème qui va dans le même sens que ce qu'évoqué précédemment: les énonciations de privilèges. Si à la base elles avaient pour objectifs de justement montrer que l'on avait conscience d'être situé socialement (en utilisant des macro-catégories sociales, ce qui est un problème dans le cadre d'une analyse individuelle car ça manque de finesse mais bref) en plus d'être la manifestation de sa volonté de "laisser la parole aux concerné.e.s" et de l'intégration de codes de groupes basés sur la hiérarchie des savoirs sur un principe d'identité.



Saaauf que ces pratiques sont en contradictions avec les thèses qu'elles prétendent défendre en plus de tailler à la hache la théorie des savoirs situés énoncée plus haut.




     Déjà, elles donnent l'illusion d'un sujet maitre de lui-même: dès l'instant où on a "checké ses privilèges" selon la terminologie en vigueur, où on reconnait son statut social, alors ce dernier se trouverait en quelque sorte annulé dans l'idéologie de celui qui parle et dans son discours. Ainsi, un homme cis qui admettrait qu'être un homme est un privilège dans la société occidentale aurait de fait un discours a-situé (l'énonciation du privilège le neutralisant symboliquement dans le discours), et ce ne serait que par conviction qu'il se trouve être, par hasard, proche des interprétations en vogue du mouvement sex-positif (et absolument pas parce que les intérêts de classe des hommes se concentrent pour partie dans le fait de soutirer un maximum de travail sexuel des femmes, quelle drôle d'idée). Elles donnent l'illusion d'un sujet maitre de lui-même et de son discours, or ce n'est pas le cas.




Autre problème: l'utilisation de grosses catégories démographiques. De fait, lesdites catégories sont trop grosses pour prendre en compte les rapports contextuels et locaux dans lesquels s'inscrivent les sujets (par exemple, les normes de virilité diffèrent selon que l'on soit dans une grande école bourgeoise parisienne ou au fin fond du limousin profond). Il s'agit de catégories héritées, qui agissent "de l'extérieur sur le discours" et qui charrient une conception de l'identité sans nuance, interprétable d'une seule manière et déjà constituée. Il y a alors naturalisation de ces catégories et leur pertinence dans l'approche et la description de l'identité ne peut être remise en question. Elles sont également trop larges: on peut citer par exemple la neuroatypie, souvent accusée d'être un énorme sac fourre-tout, le validisme (est-on jugée de la même manière selon qu'on soit en insuffisance respiratoire ou lorsqu'on est en fauteuil? Je ne pense pas. Sans compter que certains handicaps sont gênants pour certaines activités mais pas pour d'autres...).




Enfin, l'argument d'identité. Pendante glauque de l'argument d'autorité, il se manifeste toujours selon le même schéma:  seuls les X peuvent parler des X ou corollairement les Y n’ont pas le droit de parler des X, où X est une catégorisée non-privilégiée et Y la catégorie privilégiée correspondante. Cet argument met en correspondance l'expérience et le savoir, or j'ai expliqué précédemment que ce n'est pas nécessairement le cas. Ce sophisme peut prendre des formes extrêmement virulentes, comme toute personne ayant déjà un peu trainé sur les réseaux sociaux le sait. Mais surtout paradoxe ultime: elle est en contradiction totale avec la théorie du savoir situé.



En effet, Haraway (la maman du truc) considérait que si l'expérience personnelle et intime que l'on a de la domination est un bon point de départ pour l'élaboration du savoir, elle ne constitue pas un point d'arrivée. Dans sa théorie, l'expérience est une perspective sur le monde, elle permet de l'aborder selon un certain angle, un certain point de vue. Mais cette vue seule ne suffit pas; elle doit être outillée par des instruments de vision: des concepts, des théories, une méthode qui eux seuls permettent d'élaborer du savoir.

Pire, Haraway se montrait extrêmement critique sur le lien automatique entre savoir et identité. Si elle disait que c'est d'un "moi divisé et contradictoire" que l'on doit partir, elle considérait également qu'un "moi" unifié qui "est" son point de vue n'est pas un point de vue justement: il reste collé, fusionné à son assujettissement. Le problème de dire "je suis X et donc je peux parler de X" est que, ce faisant, le sujet nie la pluralité des identités qui le constitue et nie le morcellement du sujet, mais il nie également les modes de production, de fonctionnement et de réception des différents systèmes de signes qui assurent et permettent une communication entre individus nécessaires à la production du savoir. Il reconduit alors une posture tronquée et irresponsable qui est celle des savoirs qui se considèrent comme neutres : Ne pas prendre en compte le point de vue ou y rester coller revient finalement pratiquement au même : aucune médiation, stratégie, ni perspective.



Dit autrement et pour citer une grande figure de l'afro-féminisme contemporain:
   

Bell Hooks a écrit :

Avec le temps, le slogan "Le personnel est politique" (qui était d'abord utilisé pour souligner que la réalité quotidienne des femmes est influencée et modelée par la structure sociale et qu'elle est donc nécessairement politique) a fini par encourager les femmes à penser que l'expérience de la discrimination, de l'exploitation ou de l'oppression impliquait automatiquement une compréhension des mécanismes idéologiques et institutionnels qui encadrent les statuts sociaux. En conséquence, de nombreuses femmes qui n'avaient pas entièrement examiné leur situation n'ont jamais développé de vision sophistiquée de leur réalité politique ni de son lien avec celle des femmes en tant que groupe social. Elles ont été incitées à se focaliser sur le fait de donner une voix à l'expérience individuelle.

Tout comme les révolutionnaires qui œuvrent à changer le destin des personnes colonisées partout dans le monde, il est nécessaire que les militantes féministes soulignent le fait que la capacité à voir et à décrire des réalités individuelles est une étape importante dans le long processus d'auto guérison, mais que c'est seulement un point de départ. Quand les femmes ont intégré l'idée que décrire leurs propres malheurs était synonyme de développer une conscience politique critique, le mouvement féministe a arrêté de progresser. Il n'est pas surprenant que les théories et stratégies qui ont été développées sur des bases si incomplètes se soient révélées collectivement insuffisantes et peu pertinentes.

Afin de corriger cette insuffisance des analyses élaborées par le passé, nous devons maintenant encourager les femmes à développer une compréhension profonde et globale de leur réalité politique en tant que groupe. De plus larges perspectives ne peuvent émerger que si nous analysons à la fois le personnel qui est politique, les enjeux politiques sociétaux dans leur ensemble et les perspectives politiques révolutionnaires globales.


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Le féminisme matérialiste en 5 minutes

Zicielka Je peux me tromper, mais je pense qu'il y a mécompréhension sur ce qu'est le matérialisme.


J'vais essayer d'expliquer en quoi consiste cette méthode d'analyse (et non ce discours), en plus ça tombe bien parce que je n'avais jamais pris le temps de le faire sérieusement ici.



En gros, le matérialisme, c'est un courant du féminisme radical (radical dans le sens qui entend remonter aux racines de l'oppression des femmes: un système distinct du capitalisme bien qu'y étant lié: le patriarcat) qui postule que les hommes et les femmes sont non des catégories biologiques innées, mais au contraire de pures constructions sociales.


Mais pas n'importe quelles constructions sociales : A la manière du prolétariat et de la bourgeoise dans la théorie matérialiste de Marx (d'où vient le nom du courant), les femmes et les hommes constituent des classes de sexe, liées entre elles par des rapports d'exploitation : la classe des hommes tire son pouvoir et sa domination de l'exploitation des femmes, notamment à travers le travail ménager et domestique, et de l'assignation des femmes au travail reproductif, vu comme leur rôle "naturel".



De fait, ce qui définit les hommes ce n'est pas leur socialisation, leur ressenti ou quoi que ce soit de ce genre. Ce qui définit le fait d'être un homme, c'est le bénéfice que l'on tire de l'exploitation des femmes, et réciproquement pour les femmes. Ces dernières peuvent, bien entendu, mettre en place des stratégies de résistances individuelles ou collectives, et certaines peuvent s'avérer très efficaces. Mais jamais elles ne pourront atteindre les hommes, ou alors seulement à un prix extrêmement plus élevé, et pas sur tous les plans.



Cette exploitation, qui a lieu dans le couple hétérosexuel, a bien évidemment des conséquences sur tous les autres aspects de la vie sociale, à commencer par le travail salarié. Puisque les femmes sont également en charge du travail domestique (que ce soit vrai dans les faits ou pas, on estime que c'est le cas), on sera plus frileux à l'idée de leur donner des positions de pouvoir, car elles devront gérer ET le travail domestique, gratuit et non reconnu, ET le travail salarié.



De même, cette assignation au foyer est justifiée A POSTERIORI par la nature. Les femmes sont réputées plus douces, plus empathiques, elles ont de l'instinct maternel...

C'est pour cela que nous, matérialistes, disons que le genre précède le sexe: la hiérarchie précède la division.



Mieux: que la division sert à justifier la hiérarchie à posteriori. Que les différences soient réelles ou non n'a de fait aucune importance. Toute chose est différente de ce qui l'entoure, et cette différence n'est pas relative mais absolue (une carotte est aussi différente d'un ventilateur qu'un ventilateur l'est d'une carotte). Or ce n'est pas le cas des femmes et des hommes. Les femmes sont différentes / complémentaires des hommes... qui eux ne sont différents de rien. Ils sont la valeur par défaut, le maître étalon auquel on se réfère. Or les hommes sont ce qu'ils sont parce qu'ils exploitent les femmes, qui sont elles-mêmes ce qu'elles sont parce qu'elles sont exploitées ou préparées à l'exploitation par les hommes. Aussi, vouloir que les femmes "s'élèvent" pour atteindre les hommes est un non-sens. Comme l'écrit Christine Delphy dans Classer, Dominer : Qui sont les Autres


Christine Delphy a écrit :

Les caractéristiques des dominants ne sont pas vues comme des caractéristiques spécifiques, mais comme la façon d’être… normale. Bien sûr, elle ne l’est pas plus que celle des dominé.e.s. Et ces mêmes dominants somment les dominés.e.s… d’être comme eux. Sinon, eh bien sinon, c’est normal que vous n’ayez pas le droit de –entre autres choses, voter, conduire, obtenir ne promotion, avoir un logement décent, un travail correspondant à vos qualifications, vous promener sans votre carte d’identité ou tard le soir, etc.
Mais comment les Autres pourraient-ils/elles être comme les Uns ? Quand les Uns ne sont Uns que parce qu’ils oppriment les Autres ?
Or ce fait est nié et dénié en permanence. Les façons de faire et d’être du groupe dominant ne sont pas présentées comme ce qu’elles sont – des façons qu’il ne peut avoir que parce qu’il domine – mais comme la norme, comme l’universel. Et puisque c’est sur l’oppression des Autres que repose la capacité des Uns d’avoir ces façons, il tombe sous le sens que les Autres ne pourront jamais avoir ces façons, ni demain ni dans mille ans. Les Autres n’arriveront jamais à se couler dans ce qui est présenté comme une norme universelle, valable pour tous et toutes et que tous et toutes peuvent atteindre. Ce qui est une conséquence de l’altérisation et de l’altération de certains par les Uns sera interprété comme l’échec, et en tout cas la responsabilité des Autres. Les privilèges des Uns, gagnés sur le dos des Autres, apparaitront au contraire comme la juste récompense de leur capacité à atteindre la norme.




Aussi notre objectif n'est pas l'égalité. Notre objectif est l'abolition du genre lui-même. De la division en classe de sexe de l'humanité elle-même.


Autre chose qui me semble primordiale dans l'analyse matérialiste, c'est que contrairement à l'analyse libérale, qui postule que l'oppression des femmes est dû à un problème d'éducation et non à une question d'exploitation par une classe qui en a le pouvoir, c'est de postuler que la révolution féministe est possible DE NOTRE VIVANT. Il n'y a pas besoin d'attendre des dizaines et des dizaines de générations, de progresser petit pas par petits pas jusqu'à avoir une génération assez WoOke et non-sexiste pour abolir le patriarcat. Si les structures font les hommes, alors il est possible de changer si profondément les structures que les esprits seront obligés de suivre.



Et je vois difficilement moyen d'être porteur d'un plus grand message d'espoir pour nous et nos sœurs. Nous pouvons construire un monde sans genre et sans exploitation. Ici et maintenant.



Ce qui est amusant dans ton rejet du matérialisme... c'est que quand tu as vaguement parlé d'antiracisme politique, tu as eu un raisonnement matérialiste. Les blancs tirent parti économiquement des personnes racisées et de leurs (anciennes) colonies, et altérisent les personnes de couleur pour justifier ladite exploitation. Les blancs ont rendu les noirs différents et sauvages en produisant du discours pour justifier l'esclavage APRÈS avoir commencé à pratiquer ce dernier à une échelle industrielle (bon en vrai c'est un peu plus compliqué que ça mais je fais vite). En mobilisant, d'ailleurs, des discours sur le genre (en gros en disant que vu que la division homme / femme de ces sociétés étaient moins marquée que chez nous d'après les observateurs occidentaux, alors ces peuples étaient plus primitifs).




Après je le concède sans souci, y'a sur twitter des gens qui se réclament du matérialisme pour se placer dans selon elleeux dans le "camp du bien" contre les méchants "pipousafes" (qui, même s’ils ne forment pas du tout un groupe homogène comme l'appellation le laisse croire, ne sont pas parfaits non plus), et y'a dans les gens qui s'en réclament de sacré abrutis. Et y'a (eu) de nombreux abus. Et y'a des gens qui s'en réclament alors qu'iels seraient incapable de pondre un véritable raisonnement matérialiste. Bref, twitter peut-être le meilleur des outils, mais aussi le pire, quel que soit sa grille de lecture théorique.



Après oui je l'avoue: vu qu'on essaie de se baser sur la matérialité des rapports sociaux, notre analyse est, effectivement, extrêmement violente. Parce que les rapports de genre sont violents, les dévoiler l'est aussi. Mais pour détruire le genre, pour détruire l'exploitation, il faut d'abord la mettre à nu. En analyser les rouages, les sinuosités, les contradictions.


Car le but de la politique (car, rappelons-le, le féminisme est un combat qui vise la transformation sociale et est donc un combat politique, par opposition aux nouveaux mouvements sociaux qui se basent sur l'indignation décrits par Neveu) n'est pas d'être agréable. J'irais même plus loin en disant qu'il ne peut pas l'être, puisque se réclamer de l'un de ses mouvements implique de faire s'opposer ses intérêts de classe à ceux d'une autre classe qui en plus est, ici, dominante socialement.



Ce qui ne veut pas dire que la lutte ne peut pas dégager d'affects positifs. Je pense même qu'elle doit en dégager, car nous sommes mus par nos affects, qu'ils soient positifs ou négatifs. C'est notamment pour ça que créer de la sororité est un enjeu féministe majeur, et c'est également pour ça que je crois au collectif comme seul mode d'action valable car seul moyen d'en dégager hors de la recherche de sa satisfaction immédiate.




Donc oui, il est possible que mon discours t’apparaisses comme violent (et foutrement long aussi), et je m'en excuse par avance. Cependant, je pense que ce que j'ai posté plus haut sur les safe space comme anesthésiant de la volonté révolutionnaire est assez parlant.





Sources et articles utilisées et cités plus ou moins directement (en vrac déso):
   
- Sociologie des mouvements sociaux. Erik Neveu

- Introduction aux études sur le genre. Manuel collectif sous la direction de Laure Bereni

- Encyclopédie critique du genre, entrées homo/hétéro et bicatégorisation

- Le pédé, la pute et l'ordre hétérosexuel. Isabelle Clair
https://www.cairn.info/revue-agora-debats-jeunesses-2012-1-page-67.htm

- Se défendre, philosophie de la violence. Elsa Dorlin
http://www.editions-zones.fr/spip.php?page=lyberplayer&id_article=180002

- Sexe, genre et sexualités - Introduction à la théorie féministe. Elsa Dorlin

- Les « énonciations de privilèges » dans le militantisme féministe en ligne : description et critique - Noémie Marignier
https://journals.openedition.org/aad/2309#tocto1n4

- "Tu me fais violence!" la rhétorique néolibérale de la blessure, du danger et du traumatisme - Revue Vacarme
https://vacarme.org/article2766.html

- Militer : une activité safe ? Pour une critique politique de la notion d’espace safe - Fania Noël
http://contre-attaques.org/magazine/article/militer-une

- Five faces of oppression - Iris Young
https://mrdevin.files.wordpress.com/2009/06/five-faces-of-oppression.pdf

- J'ai une femme exceptionnelle. Carrière des hommes hauts fonctionnaires et arrangements conjugaux - Alban Jaquemart
https://f-origin.hypotheses.org/wp-content/blogs.dir/1581/files/2014/12/114-femme-exceptionnelle-carrieres-hommes-hauts-fonctionnaires.pdf

- Le marxisme, outil ou obstacle au féminisme ? Entendez-vous l'éco? Sur France Culture
https://www.franceculture.fr/emissions/entendez-vous-leco/des-nouvelles-de-marx-44-marxisme-et-feminisme

- Classer, dominer, qui sont les "autres"? Christine Delphy

- L'ennemi principal - Penser le genre - Christine Delphy

- Sexe race et pratique du pouvoir, l'idée de Nature - Colette Guillaumin
https://leseumcollectif.wordpress.com/2017/03/08/colette-guillaumin-le-sexage-et-nous-part-1/

- Les courants de la pensée féministe - Cours de Louise Toupin, UQAM
http://1libertaire.free.fr/Histoirefeminisme01.html

- La matrice de la race - Elsa Dorlin

- Cartographies des marges : intersectionnalité, politique de l’identité et violences contre les femmes de couleur - K.W Crenshaw
https://www.cairn.info/revue-cahiers-du-genre-2005-2-page-51.htm

- De la marge au centre. Théorie Féministe – Bell Hooks


- J'en oublie lol


En guise de conclusion, et pour vous remercier d'avoir lu jusque-là, voici un phoque avec le hoquet

Lien de l'image externe



PS vu qu'un peu avant ça parlait d'horologe biologique et d'instinct maternel ça peut intéresser des gens:

https://www.theguardian.com/society/2016/may/10/foul-reign-of-the-biological-clock Foul reign of the biological clock - The Guardian


https://www.scienceshumaines.com/y-a-t-il-un-instinct-maternel_fr_2849.html Y'a-t-il un instinct maternel? Magazine sciences humaines


https://gendersociety.wordpress.com/2017/05/15/there-is-no-maternal-instinct/ There is no maternal instinct - Gender & Society


Vous avez le droit de m'envoyer des cailloux en MP pour mon retard et mon incapacité à la concision.

Dernière modification par Evelirune (Le 13-07-2018 à 13h04)


                                           

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#841 Le 05-07-2018 à 20h14

Bimb'sensei
HelvegeN
.
Messages: 1 043

Merci Evelirune pour ce pavé de toute beauté que j'avais eu la chance de lire en avant première, le relire une deuxième fois fut tout aussi intéressante, en plus je remarque tu as ajouté quelques petites choses.

J'espère vraiment qu'il va être lu vu le temps que tu as passé à le rédiger.

Ce serait dommage de perdre ça dans les archives MB, j'aimerais bien pouvoir y accéder via un article de blog par exemple, whatever.

Merci  /modules/forum/img/smilies/coeur.gif

Dernière modification par HelvegeN (Le 05-07-2018 à 20h20)




https://i.pinimg.com/150x150/2c/46/25/2c46256213f6d44196c16b562768aeb5.jpghttps://encrypted-tbn0.gstatic.com/images?q=tbn%3AANd9GcQdcsRah1cJLqrIUl_wxHn3kc7sCtQh5TCt6g&usqp=CAU

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#842 Le 05-07-2018 à 20h24

Bimb'Super Saïyen
Kira-11
#Niveau151
Messages: 9 275

Personnellement j'ai tout lu, sauf la partie "Le ressenti est-il un bon outil?", je me suis surtout concentrée sur les liens en fin de post, vu que je me posais cette question.

Merci pour ce "pavé" informatif en tout cas, à l'occasion je l'irai la partie que je n'ai pas encore lu.


https://zupimages.net/up/19/41/271o.jpg

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#843 Le 06-07-2018 à 16h53

Bimb'incrust
isabelleh
**************************
Messages: 1 802

Merci Evelirune, quand j'ai vu la longueur du pavé (c'est plus un pavé c'est un trottoir complet) me suis dit j'espère que ça n'en rebutera pas certain.e.s. Mais non foncez, c'est très intéressant, super structuré, agréable à lire et très lisible!

Et vu qu'il y a des petits titres mauves, on est pas obligées de lire d'une traite (perso' j'ai lu en plusieurs fois et ça pose pas de souci).

Et pour celleux qui trouvent la capture de l'article d'Elsa Dorlin écrit en tout petit, petite astuce si jamais vous ne le savez pas cliquez "Ctrl" + "+" pour agrandir et "Ctrl" + "-". Surtout qu'il est intéressant!


//photo.ma-bimbo.com/fr/28/13629/moy/10903149.jpg                                                           

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#844 Le 15-07-2018 à 20h04

Bimb'adonf
Evelirune
Messages: 488

isabelleh Kira-11 HelvegeN maroam9 (?) Merci beaucoup pour vos gentils messages /vendor/beemoov/forum/../../../public/forum/smilies/smile.png


J'ai rajouté deux petits paragraphes dans la partie sur le féminisme matérialiste parce que j'en avais oublié des aspects importants du coup je les refous dans ce message là pour qu'ils se voient bien:


De fait, ce qui définit les hommes ce n'est pas leur socialisation, leur ressenti ou quoi que ce soit de ce genre. Ce qui définit le fait d'être un homme, c'est le bénéfice que l'on tire de l'exploitation des femmes, et réciproquement pour ces dernières. Elles peuvent, bien entendu, mettre en place des stratégies de résistances individuelles ou collectives, et certaines peuvent s'avérer très efficaces. Mais jamais elles ne pourront atteindre les hommes, ou alors seulement à un prix extrêmement plus élevé, et pas sur tous les plans.


[...]


Autre chose qui me semble primordiale dans l'analyse matérialiste, c'est que contrairement à l'analyse libérale, qui postule que l'oppression des femmes est dû à un problème d'éducation et non à une question d'exploitation par une classe qui en a le pouvoir, c'est de postuler que la révolution féministe est possible DE NOTRE VIVANT. Il n'y a pas besoin d'attendre des dizaines et des dizaines de générations, de progresser petit pas par petits pas jusqu'à avoir une génération assez WoOke et non-sexiste pour abolir le patriarcat. Si les structures font les hommes, alors il est possible de changer si profondément les structures que les esprits seront obligés de suivre.



Et je vois difficilement moyen d'être porteur d'un plus grand message d'espoir pour nous et nos sœurs. Nous pouvons construire un monde sans genre et sans exploitation. Ici et maintenant.


Alors oui ça passera par de la coercition. Oui ça passera par de la grosse intervention étatique. Mais je pense que nous n'avons pas le temps d'attendre que les hommes se décident à se bouger les miches.

Une femme sur 10 violée, une femme sur 10 battue en France, ce ne sont pas que des statistiques.




missmimijuju22 J'vais essayer de te répondre rapidement (pour de vrai cette fois /vendor/beemoov/forum/../../../public/forum/smilies/tongue.png ) sur les autres points que l'injonction à la maternité (qui ne concerne que les femmes cis et hétéro, les autres étant vu comme des aberrations de la nature. Et les aberrations, c'est mieux si ça se reproduit pas) vu que je l'ai déjà plus ou moins fait dans mon post d'avant:



Le problème pour moi c'est vraiment pas une histoire de mâle / femelle mais de contrôle des corps, d'exploitation et de classe sociale. Il n'y a pour moi aucun intérêt à parler de "fonctions biologiques" lorsqu'il s'agit d'analyser les mécanismes du patriarcat.



Si effectivement une part du travail dévolu aux femmes est naturalisé comme un but lorsque celui-ci est associé à ce qui sert de marqueurs pour délimiter cette classe de sexe (aka les organes sexuels primaires et secondaires et plus globalement les performances de genre), c'est bien dans cet ordre là qu'il faut voir les choses.
Dit autrement, les femmes ne sont pas exploitées parce qu'elles ont un utérus: l'utérus sert à justifier l'exploitation des femmes en naturalisant leur rapport au social. Car rappelons le, aucun organe n'est porteur de sens en soi, c'est nous qui leur en donnons un.



Le foie par exemple n'est pas "fait pour" traiter les toxines, fabriquer du glucose et de la bile: le foie joue un rôle dans le traitement des toxines par l'organisme ainsi que dans la néoglucogenèse et la fabrication de la bile. Ça peut sembler anecdotique mais ça ne l'est pas du tout. En donnant du sens à la nature (et en postulant la dualité nature/culture d'ailleurs, qui est loin d'être universelle), nous donnons du sens à ce qui est perçu comme naturel. Or, les femmes, comme toutes les catégories dominées d'ailleurs, sont vues comme plus proches de "l'état de nature" (ou moins civilisées / complexes pour le dire plus salement): les femmes sont le corps quand les hommes sont l'esprit, et on cherche la cause de nombre de leurs comportements dans leur "nature" (instinct maternel, horloge biologique, "t'as tes règles"... n'en jetez plus la coupe est pleine).




Or qui dit naturalisation dit que tout ce qui sort de la jolie norme du patriarcat est traité comme autant de monstruosités. C'est notamment pour ça qu'il y a une opposition sociale si forte à ce que les lesbiennes puissent avoir recours à la PMA : parce que plus qu'une histoire de rôle des femmes, il y a aussi une histoire de PLACE des femmes. Et cette place, elle est à se faire exploiter dans le couple hétérosexuel, qui lui seul est vu comme respectant "l'ordre naturel".

Alors qu'il y a pas plus social que la famille et la filiation, et pour ça je vous invite très très très fortement à écouter cette conférence de Maurice Godelier, anthropologue de son état, lors des auditions sur le mariage pour tous.





C'est aussi pour ça que les termes comme "personnes à utérus" sont tout pétés: ils renaturalisent un problème social en le faisant revenir à une histoire d'organes et pas de domination.


En outre il ne faut pas oublier que le sexe est tout aussi construit que le genre, que ça soit dans le passage de la partie (pénis / vagin à la naissance, puis apparence générale modelée par les performances de genre) au tout (être un homme / une femme), dans l'union de nombreux marqueurs pas forcément liés entre eux pour ne créer artificiellement que deux catégories biologiques ou même dans la sexualité et la manière dont on l'aborde.


Il peut donc être parfaitement juste de parler de SEXE pour désigner les catégories hommes / femmes, et ce sans désigner les organes génitaux et sans parler de ce que le médecin a foutu sur ton acte de naissance.


Je pense même qu'on devrait se réapproprier ce terme pour rappeler une bonne fois pour toute que le sexe est social.


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Pour ce qui est de l'accusation de TERF soyons honnêtes : elle est utilisée à tout va pour marquer du sceau de l'infamie les féministes qui soit n'ont pas la même analyse de la transidentité, soit qui sont transphobe à des échelles très variables (par méconnaissance ou par maladresse).

Parce que oui, la plupart des féministes transphobes ne sont pas des TERFs.



Alors me faites pas dire ce que j'ai pas dit. Les TERF, ou les "Gender critical" comme elles ont plus souvent tendance à s'appeler, ça existe. On en a vu à la pride de Londres par exemple, avec des slogans extrêmement violents.



Le postulat de base des TERF est généralement (mais pas toujours) opposé à celui des matérialistes: l'existence de la catégorie femme précède le patriarcat, et c'est "la biologie féminine" qui est à l'origine de l'oppression des femmes (par exemple via des énoncés comme les hommes ont compris le pouvoir des femmes dans le fait qu'elles portaient des enfants et cherchent à le contrôler). Dit autrement, pour elles femmes et "femelles", c'est pareil. Dit encore autrement, c'est parce que l'on a un utérus que l'on est une femme et que l'on est oppressée.



Partant de là, elles estiment que les femmes trans sont des infiltrées, les hommes trans des traitres, et vont mettre toute leur énergie et tout leur militantisme à essayer de leur pourrir la vie.

Dans les deux cas, ça va passer par une complexification des moyens de transition (médicales ou légales notamment), auquel s'ajoute pour les personnes trans dont la transition est achevée des violences en tout genre (outing forcés, violences physiques etc) et pour celles dont la transition commence de la dissuasion en jouant notamment sur l'instabilité psychologique (avec une pseudo-bienveillance pour les hommes trans, et avec déjà énormément de violences pour les femmes trans).



Mais les TERF n'invoquent pas que la biologie, elles invoquent aussi la socialisation primaire, comme on peut par exemple le voir ici. Dit autrement, comme les femmes trans ont reçue une éducation "masculine", alors elles ne seront jamais totalement des femmes, et vice versa.




Sauf que, et c'est là que ça me fait bien marrer (jaune, je trouve ça terrifiant vu la popularité de certaines figures qui en font partie), cette idée que les hommes trans sont "moins toxiques" que les hommes cis parce que leur socialisation primaire est féminine on la retrouve pas mal dans certains milieux queerous tumblriens et twitteriens qui empestent la transmisogynie.



Y'a des tentatives de corriger le truc, notamment en essentialisant le genre et la transidentité et en les rendant innés (ce qui du coup est sexiste tout court, pas beaucoup mieux) et en disant que vu que les femmes trans ont toujours été des femmes, la socialisation masculine n'aurait "pas marché" sur elles... sauf que du coup en retournant le raisonnement ça marche pas non plus pour justifier la moins grande toxicité des mecs trans, ce qui ne les empêche pourtant pas de continuer à invoquer cette dernière pour dire qu'ils sont moins toxiques.

Sans compter que généralement ça rattache la féminité à des choses comme la douceur et l'effacement, valeurs qui y seraient intrinsèque et positives, ce qui est également sexiste.



Bref je pense qu'on gagnerait à se demander un peu moins si telle catégories est toxique / se comporte comme elle le fait à cause de sa socialisation primaire et un peu plus à se rappeler que la violence des hommes ne vient pas tant de leur éducation que de leur domination économique, sociale et culturelle sur les femmes, et de se demander dans quelle mesure la transidentité influe sur cette dernière.



Car ce n'est pas la socialisation qui fait la domination, mais le pouvoir et sa répartition inégalitaire. Une femme (cis ou trans) qui se "comporterait comme un homme" (quoi que ça veuille dire) n'en resterait pas moins une femme et n'en serait pas moins dominée socialement.



Du coup ça me permet aussi d'évacuer pourquoi les termes AMAB / AFAB sont tous pétés et transphobes, encore plus lorsque utilisés comme synonymes de "sexe assignés à la naissance / lors de la socialisation primaire".

Transphobe car renvoyant les individus à leur sexe assigné à la naissance sans rien dire de leur sexe actuel (en plus de foutre homme cis / femme trans  et vice versa dans le même sac), et car estimant que ce renvoi est plus pertinent pour penser leur situation que, justement, leur situation matérielle actuelle.



N'ayons pas peur d'utiliser le mot sexe pour parler de transitionou de sexisme. Il est bien plus pertinent que ces bricolages qui pour la plupart se contentent de tourner autour du pot ou utilisent des concepts mal digérés, quand ils ne sont pas purement et simplement nocifs.

Dernière modification par Evelirune (Le 27-07-2018 à 14h23)


                                           

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#845 Le 26-07-2018 à 18h43

Bimb'Bronze
missmimijuju22
Sun of a beach
Lieu: N'importe où, du temps qu'il y a de la bouffe.
Messages: 12 963

Bon bah tout d'abord, merci Evelirune pour ta réponse, et désolée d'avoir pris un peu (beaucoup) de retard pour la mienne.
En fait, si j'avais recours aux "fonctions biologiques", c'était plus en opposition à tout ce truc autour de l'identité de genre, comme quoi t'as qu'à te dire homme/femme pour être un homme/une femme.  Alors que c'est quand même plus compliqué que ça. Mais si je suis pas à côté de la plaque, tu me rejoins sur ce point.
Après, j'ai bien lu tout ce que tu as écris, j'ai encore quelques trucs à assimiler mais ça fait sens, globalement.



I won't forget the things you've said
They're dancing and singing inside my head

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#846 Le 28-07-2018 à 21h13

Bimb'adonf
Evelirune
Messages: 488

Tkt je suis mal placée pour donner des leçons niveau retard dans les réponses fufufu


Que la transidentité soit plus compliquée qu'un simple ressenti bien sûr (d'ailleurs c'est très "drôle" de se baser sur des trucs comme le "ressenti" ou la "conviction" d'être un homme ou une femme dans le corps du sexe opposé, vu que c'est exactement les définitions utilisées pour pathologiser les personnes trans), déjà parce que dans les faits ça laisse pas mal de gens sur le carreau, mais aussi parce que l'on est jamais oppressé uniquement sur la base d'un ressenti qui par définition ne peut pas sortir de ta caboche. L'appartenance à une classe de sexe est un fait social basée notamment sur la perception que les autres ont de toi (via la manière dont tu vas performer le genre notamment) et sur les bénéfices ou les désavantages que tu vas tirer et de cette perception, et du fait que tout dans la société t'encourages (et te contraint) à suivre les normes qui sont celles de ta classe.




Perso je considère qu'on est trans dès l'instant où on transitionne, ou dès l'instant où on a envie de transitionner (que l'on le puisse ou pas), et ce qu'il s'agisse d'une transition sociale, hormonale et/ou chirurgicale. Et que plutôt que de répéter sur l'air des lampions que l'on est Valide et Légitime si notre ressenti / identité de genre ne correspond pas à notre genre / (classe de) sexe, on devrait plutôt se demander comment aider les personnes trans qui ont peur / ne peuvent pas envisager la transition pour le moment à passer le cap au plus vite.



Sinon le collectif a écrit un truc sur les termes AMAB / AFAB : http://www.radicalisees-sur-internet.fr/2018/07/21/amab-afab/


Et si ça intéresse l'intégralité des numéros de la revue "Questions Féministes" en accès libre ici. Y'a énormément de textes fondateurs de la 2e vague dedans, donc hésitez pas à jeter un œil aux numéros. https://mega.nz/#F!odljHYzA!ZzKEKbravMr2Saqm4QldeA


                                           

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#847 Le 01-08-2018 à 01h59

Bimb'bimbo
mimi111999
amour
Lieu:
Messages: 1 380

Bonsoir bonsoir  /vendor/beemoov/forum/../../../public/forum/smilies/big_smile.png

Après quelques années d'absence sur ce site, une légère insomnie, un triage de vieux e-mail et une pointe de curiosité je me suis vue venir sur le site de mon enfance et rien a changé /modules/forum/img/smilies/coeur.gif

Je me revendique moi-même féministe, je suis donc pour l'égalité homme-femme.

Cependant depuis quelques temps sur twitter se passe des choses qui me dépassent : dernièrement le mouvement #jesuiscute consiste aux femmes (et hommes) de poster des photos d'elles (eux), ils se valorisent donc, s'acceptent et s'assument aux yeux de tout internet. (Je n'ai rien contre les personnes qui postent leur tête même si je pense qu'Internet est dangereux car tout y reste mais c'est un autre débat et je sens que je m'étale)

Mais beaucoup de ces jeunes filles ou jeunes femmes y postent leur corps, en maillot de bain, en sous vêtement, ou bien totalement nu revendiquant le féminisme.

Elles sont absolument libres de poster ce qu'elles veulent mais je ne comprends pas (et je suis totalement ouverte au débat), en quoi poster son corps nu au sein d'internet fait avancer la cause féministe ?

Bien sur je ne parle pas d'une éventuelle sexualisation de ces photos faite par les esprits malveillants ... Mais je parle uniquement du but, de l'effet recherché sur les autres de montrer son corps au monde entier ?

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#848 Le 01-08-2018 à 09h57

Bimb'Belle
Sensorium
My eyeliner isn't straight but neither is my sexuality
Lieu: Strasbourg
Messages: 17 217

On voit surtout l’intérêt du féminisme quand on voit les retours aka : les menaces de viols/morts, les insultes, et tout ce que peuvent subir les femmes qui postent sous ce hashtag.

C'est ouf quand y a des mecs bourrés qui se montrent à poil avec un drapeau dans les fesses à la coupe du monde c'est méga trop lol, mais quand des femmes montrent leur corps pour porter un message politique (c'est à dire c'et mon corps, je l'aime et je fais ce que je veux) c'est scandaleux. Deux poids deux mesures.


RektGang

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#849 Le 01-08-2018 à 10h23

Bimb'Bronze
sissi1428
Never gonna give you up, never gonna let you dooown (t'as perdu)
Lieu: Avec sa chérie, dans ses rêves...
Messages: 12 994

Il y a aussi un effet de réappropriation qui se fait. Je m'explique :
Comment dit Senso, entre homme et femme, il y a deux poids, deux mesures. Des hommes torses nus, on en a tous vu (même si, au nom de l'égalité, en France, c'est interdit par la loi de se balader torse nu. C'était plus simple d’interdire aux hommes que de l'autorisé pour les femmes...Mais ce n'est souvent pas appliqué en été...), mais on a très peu vu de femmes torses nus, si ce n'est des corps qui sont passés par de la chirurgie plastique et photoshop.

En montrant des torses au naturel, on voit enfin de la cellulite (même sur les plus fines), de la graisse, des poils, des seins qui tombent et bien d'autre trucs encore. Bref tout un panel de corps qu'on n'a pas l'habitude de voir. Et surtout beaucoup de corps qui sortent des dictacks imposés par le patriarcat.

Et mine de rien, ça peut faire beaucoup de bien à pas mal de personnes.

Il y a eu la même chose (mais pas sur twitter) en ce qui concerne les lèvres vaginales. Une mode (toujours en cours ?) voulait (ou veut) que rien ne dépasse des grandes lèvres, quitte à passer par la chirurgie pour couper les petites lèvres. Beaucoup d'ado (et probablement des jeunes adultes et possiblement des moins jeunes) ont commencé à complexer à cause de ça, se trouvant anormal car les petites lèvres dépassées ou n'étaient pas parfaitement droites, etc. Ce qui est con. Voyant ça, une femme a décidé de prendre son entre-jambe en photo et l'a posté sur un site dédié exprès, en demandant à d'autres femmes de lui faire parvenir d'autres photos pour montrer la diversité qu'il peut exister. Et ça a probablement calmé le jeu pour beaucoup.

Bref, en gros, le patriarcat nous impose des normes de beautés (irréalisable) qu'il A-BSO-LU-MENT respectait si on veut que les hommes nous trouvent à leur goût. Posté des photos de nos corps au "naturel" (oui, on a le droit de passer par la chirurgie) c'est un gros doigt tendu vers le patriarcat en lui disant "MON corps ME convient comme il EST. Je ne me rendrais pas malade pour toi." mais c'est aussi dire "Les filles, les femmes, vous êtes belles comme vous êtes. Nos corps sont multiples, avec de multiples beauté. N'essayez pas à tout prix de rentrer dans des standards qui sont impossible à atteindre et qui peuvent mettre votre vie en danger"


Mon instagram.
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#850 Le 01-08-2018 à 21h32

Bimb'adonf
Evelirune
Messages: 488

Tout en étant d'accord avec les messages au dessus, et en pensant qu'il faut défendre bec et ongles les meufs qui se se font insulter / menacer / peu importe pour avoir posté leur image dénudée sur internet de leur propre volonté, je pense (comme Chercherjournal que je vais plagier sans honte) qu'il faut quand même se poser deux trois questions sur les implications politiques ce genre de mouvements:


- Les normes sur les corps des femmes VS la diversité des corps des dits femmes (on va pas se mentir, le but même du # c'était de se mettre en valeur, et donc dans l'immense majorité des cas de coller à des canons de beauté, consciemment ou non).


- La nudité comme action politique à une époque où la nudité féminine sert de vitrine pour vendre des yaourts (non pas dans le sens "cachez ce sein que je ne saurais voir" mais plus dans le sens est-ce que la nudité féminine est encore vraiment si subversive que ça, et si oui dans quels contextes l'est elle?)


- Même question, est ce que le problème n'est pas plutôt dans la sexualisation automatique des corps féminins nus (y compris dans des situations où sexualiser est absurde genre quand des femmes allaitent) plutôt que la nudité elle-même?


- La question de la pression collective. Qu'est ce que ça veut dire "assumer son corps". Dans quels cas est-ce valorisé, dans quels cas non? Par ce genre de mouvement, crée-on une "pression" au fait de montrer son corps / par un mouvement inverse fait on passer celles qui s'y refusent pour des meufs "coincées"?


- La mise en concurrence des corps des femmes, élément qu'il me semble difficile de passer sous silence.


- La mise à distance entre corps politique et corps économique. Le corps de des femmes n'est pas que esthétique, c'est aussi voire surtout un outil de travail. A ce sujet y'a pleins de trucs super intéressants à lire notamment chez Paola Tabet http://www.crepegeorgette.com/2014/04/07/paola-tabet-grande-arnaque-sexualite-femmes-echange-economico-sexuel/


- Le lien encore automatique entre nudité et sexualisation du corps des femmes / la difficulté à casser le lien entre amour de son corps et fait de se trouver belle / capacité réelle ou supposé à se trouver désirable.


sissi pour la nymphoplastie (vu que c'est comme ça que ça s'appelle) c'est toujours en très forte augmentation depuis quelques années (de mémoire on était de l'ordre du +300% en 10 ans). Y'a le documentaire "à quoi rêvent les jeunes filles qui en parle rapidement (mais il est déconseillé au moins de 16 ans pour cause de gens tous nus dedans)


Sinon plus y'a ces articles de antisexisme que je trouve très bons sur l'(auto)-objectivation et sur les idéaux de beauté féminins

https://antisexisme.net/2013/08/13/objectivation-1-2/
https://antisexisme.net/2016/01/02/impuissance-01/

Dernière modification par Evelirune (Le 02-08-2018 à 02h11)


                                           

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